Hervé Tanquerelle se souvient d’un voyage au Groenland en compagnie de Jørn Riel et en tire une fiction pleine de fantaisie, hommage pas du tout caché à Hergé et son Etoile mystérieuse.
En août 2011, Hervé Tanquerelle effectue un voyage au Groenland. Sur le trois-mâts qui l’y emmène se trouvent également des scientifiques et Jørn Riel, écrivain danois dont il a adapté les Racontars arctiques avec Gwen de Bonneval. Ce voyage, qu’il a retracé sur son blog, sert de formidable matière première à Groenland Vertigo, et toute ressemblance avec des personnes existantes n’est pas fortuite.
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On retrouve donc ici un auteur de BD, Georges Benoît-Jean, dont le fait d’arme est d’avoir adapté les nouvelles d’un écrivain danois, Jørn Freuchen. Tous deux partent sur une goélette pour le Groenland, en compagnie de quelques scientifiques. Les paysages qu’ils traversent, les îles où ils s’arrêtent, la nature qu’ils admirent correspondent parfaitement aux photos saisissantes que Tanquerelle a ramenées de son voyage.
Tanquerelle brouille les frontières entre réalité et imaginaire
Mais Hervé Tanquerelle n’a pas voulu faire un vrai carnet de voyage documentaire et a préféré glisser vers la fiction. Au cœur du récit, et du voyage, se trouve ainsi un artiste allemand qui doit installer une mystérieuse œuvre sur un iceberg pour dénoncer les lobbies pétroliers et qui intrigue particulièrement Georges… Les personnages ont tous un caractère bien défini et cartoonesque – l’artiste, parano et colérique ; Georges, bougon et un peu ahuri ; le sous-fifre de l’artiste, servile et martyrisé…
Dans des scènes au ton toujours comique, Hervé Tanquerelle tord si bien la réalité qu’il est parfois difficile de savoir où elle s’arrête et où commence son imagination – exactement comme dans les racontars de Jørn Riel. L’insertion, dans des pages aux tons bleutés, d’anecdotes plus ou moins crédibles racontées par Jørn Freuchen ne fait que brouiller encore plus les frontières.
Les personnages ont des tronches de héros hérgéens
Mais le jeu des ressemblances ne s’arrête pas là car Hervé Tanquerelle a aussi pris le parti de raconter son histoire façon Hergé, période L’Etoile mystérieuse – l’ambiance à bord lui ayant tout de suite évoqué cet album, avoue-t-il. Les clins d’œil amusants sont nombreux, dans les personnages qui ont tous des tronches de héros hergéens, dans la police de caractères, dans les gags bon enfant et dans les détails (le navire s’appelle Aurora, quand celui de L’Etoile mystérieuse se nomme Aurore…).
Grâce à sa grande fantaisie et à ses extrapolations fictionnelles, Hervé Tanquerelle réussit à construire un récit de voyage plein de peps et parfaitement rythmé. Son étonnant mélange graphique de beaux décors réalistes au lavis et, évidemment, de ligne claire, ajoute encore de l’éclat à l’album. Une très rafraîchissante ode à l’aventure, doublée d’un hommage malin à Hergé.
Groenland Vertigo (Casterman), 104 pages, 19 €
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