Dans une biographie documentée, Marion Van Renterghem retrace la trajectoire mouvementée de Franz-Olivier Giesbert : le récit d’un parcours journalistique au cœur du pouvoir.
Aux yeux de la génération post-68 abonnée dans les années 1970-1980 à son hebdomadaire de référence, Le Nouvel Observateur, le départ en 1988 de sa plume vedette Franz-Olivier Giesbert pour Le Figaro fut un choc, à la mesure des désillusions d’alors à l’égard du pouvoir.
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Comment un journaliste de gauche pouvait-il diriger le quotidien historique de la droite sans faire le deuil de ses engagements passés et d’un minimum d’éthique intellectuelle ? A la continuité, Franz-Olivier Giesbert semble avoir toujours préféré les discontinuités, ne serait-ce que parce qu’elles bousculent l’ordre figé d’une existence qui ne veut pas abriter les formes de l’ennui.
“Traître et connivent”
Comme tous les mélancoliques rentrés et les insatisfaits patentés, FOG a besoin de provoquer, de jouer contre les autres autant qu’avec lui-même. C’est ce goût des paradoxes que Marion Van Renterghem saisit dans FOG – Don Juan du pouvoir. “Traître et connivent”, “tendre et assassin”, “mondain et ermite”, “parisien et terrien”, “prédateur sans plan de carrière”, FOG est cet homme double aux deux prénoms, perdu entre des pulsions opposées et des désirs inversés.
Nourrie de plus de 150 entretiens avec ses proches et ennemis (parfois les mêmes), la biographie saisit la complexité romanesque d’une figure médiatique dont les affèteries, l’entregent, les ambitions agacent et intriguent tout autant.
Seule certtitude : ses ritournelles libérales
L’enquête oscille entre ces deux pôles, même si elle se préserve d’une lecture trop moraliste devant cet homme d’influence qui, ayant dirigé trois journaux (Le Nouvel Obs, Le Figaro, Le Point), animé diverses émissions de télé, publié des livres en pagaille, participé à des jurys littéraires, a toujours aimé “tirer les ficelles” et “jouer à vérifier qu’il est toujours le maître en tout, partout”.
S’il se définit lui-même comme quelqu’un “d’incertain”, une certitude affleure pourtant : son envie de crâner, de jouer dans la cour des pouvoirs, qu’il dénigre et flatte au gré de ses humeurs. A force de déjouer ses desseins, on ne sait plus très bien ce qu’il pense au fond, en dehors de ses ritournelles libérales habituelles qui l’ont éloigné de son camp d’origine.
Franz-Olivier Giesbert, l’archétype du brouillage idéologique
Si l’intéressé préférerait ressembler à Saint-Simon ou à Julien Green, cet alliage entre une parole journalistique académique et un verbe plus proche de la comédie réduit son extravagance à ce qu’elle est : le produit d’un brouillage idéologique qu’il a accompagné, voire préfiguré.
Sans élucider tous ses secrets, Marion Van Renterghem dévoile les carnets de bal d’un courtisan qui ne se “vautre” dans les filets du pouvoir que pour s’amuser à en décrire le théâtre.
FOG – Don Juan du pouvoir (Flammarion), 268 pages, 18 €
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