A travers l’affaire Lucie Blackman, jeune Britannique disparue dans les rues de Tokyo en 2000, le journaliste Richard Lloyd Parry livre une enquête vertigineuse et terrifiante sur les démons du Japon contemporain.
Reporter de guerre et correspondant pour The Independent puis The Times, Richard Lloyd Parry a couvert l’Afghanistan et le tsunami japonais en 2011. Dans sa carrière, il a été témoin de “son lot de douleurs et de noirceur”. Pourtant, ce n’est ni la guerre ni les catastrophes qui ont hanté les nuits du journaliste britannique pendant dix ans, mais une affaire d’un tout autre genre. Un cauchemar tokyoïte qui a “contaminé ses rêves » et l’a “confronté à certains aspects de la condition humaine qu’(il) n’avait jamais vus auparavant (…), des existences effrayantes, violentes, monstrueuses.”
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L’affaire remonte à juillet 2000 et à l’inquiétante disparition de Lucie Blackman, jeune Anglaise de 21 ans exilée à Tokyo. Blonde, grande, criblée de dettes, la jeune femme, ancienne hôtesse de l’air, avait choisi de s’envoler pour la capitale japonaise, attirée par les promesses d’anonymat, d’exotisme et d’argent facile.
Un job d’hôtesse dans un club pour salarymen
En quelques jours, accompagnée de Louise, son amie d’enfance, elle avait trouvé un job d’hôtesse dans un club pour salarymen de Roppongi, le quartier interlope de Tokyo. Sa mission y était d’écouter, de distraire et de flatter des hommes d’affaires aisés dans le but de leur faire consommer de l’alcool. Et parfois d’accepter des dîners privés avec les plus généreux d’entre eux. Une activité à mi-chemin entre la serveuse et l’escort, typique de la culture japonaise.
C’est ainsi que Lucie Blackman fit la connaissance de Joji Obara, étrange millionnaire d’origine coréenne au passé trouble, dont les élégantes manières ne pouvaient laisser imaginer qu’il était un monstre façonné par l’histoire, la culture et les vices de la société japonaise d’après-guerre.
Résultat d’une investigation obsessionnelle étalée sur plus de dix ans, Dévorer les ténèbres se lit comme une plongée dans les recoins les plus obscurs d’un pays dont on dit qu’il est le plus sûr au monde. Plus qu’un simple true crime addictif, Richard Lloyd Parry livre ici une enquête fascinante sur les dysfonctionnements et les hypocrisies du système nippon tout entier : du racisme historique à la misogynie endogène.
Une critique qui vire même au réquisitoire lorsque l’auteur évoque le fonctionnement ubuesque d’un appareil judiciaire et policier qui aura laissé pendant plus de trente ans un homme droguer, violer et filmer près de quatre cents femmes, et en tuer au moins deux.
Dévorer les ténèbres – Enquête sur la disparue de Tokyo de Richard Lloyd Parry (Sonatine), traduit de l’anglais par Paul Simon Bouffartigue, 528 p., 23 €
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