Des copines échangent librement sur la vie, le sexe et le sexe. Une vision désinhibée et grinçante en cases libres et crues
Attention, il ne faut pas se fier à son trait élégant : avec Nine Antico, la BD se mouille, embrasse à bras-le-corps les sujets les plus délicats, sans passer outre leurs aspérités, leurs ambiguïtés. Dans son premier album, Le Goût du paradis (2008), la dessinatrice française racontait son adolescence dans le 93, son attirance de gentille fille pour les vilains garçons et autres caïds de banlieue. Nine aime mettre son crayon là où ça fait le plus de sens, quitte à le couvrir de soufre.
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Coney Island Baby l’a vu aborder le féminisme par le biais de deux personnalités aux destinées distinctes : la pin-up Betty Page et la première star du porno, Linda Lovelace. Electrocutée par le rock’n’roll (témoin son fanzine désormais collector Rock This Way), Nine Antico a passé sous son scalpel le rêve américain des sixties réécrivant librement la vie de Pamela Des Barres, mythique groupie devenue écrivaine et mémoire des années folles du rock.
« Quelle féministe es-tu quand tu es amoureuse ? »
Décliné en deux volumes, l’un lumineux comme la pop des Beach Boys, l’autre sombre comme les yeux de Charles Manson, Autel California suivait de près la nymphette Bouclette – alter ego de Des Barres – dans son exploration de la Californie. En mêlant fantasmes et réalité dans ce diptyque au casting prestigieux (les Rolling Stones, Phil Spector, etc.), la dessinatrice se posait des questions aussi complexes que : « Quelle féministe es-tu quand tu es amoureuse ? »
Pas du tout nostalgique, Nine Antico s’efforce aussi, à la manière grinçante et désinhibée d’une Lena Dunham (la série Girls), d’ausculter son époque. Elle l’a réalisé avec Girls Don’t Cry, Tonight et America, trois albums centrés sur le personnage de Pauline, jeune femme amoureuse, larguée puis de nouveau amoureuse, etc. Avec Maléfiques, elle va encore plus loin, montrant des copines qui parlent cul et cru, mooncup et gode, douches vaginales et infections sexuelles.
Cependant, la liberté de ton dont ses personnages usent ne se veut pas provocatrice, il s’agit d’avantage d’approcher avec le plus de naturel et d’humour possible l’art de la conversation tel que pratiqué en ce troisième millénaire. Maléfiques ? Divinement drôle.
Maléfiques (L’Association), 64 p., 16 €
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