Il avait fait de sa vie un combat pour la mémoire, et pour la paix dans le monde.
Adolescent, Elie Wiesel vivait en Transylvanie où il était né en 1928. C’est à ce moment-là qu’il a été déporté, avec sa famille, à Auschwitz d’abord, puis à Buchenwald. Seul avec deux de ses sœurs à avoir survécu, il est venu en France, recueilli à la fin de la guerre par l’Œuvre juive de secours aux enfants. Il a étudié la philosophie à la Sorbonne, puis a écrit, enseigné, donné des conférences, parcouru le monde pour, partout, accomplir un travail de mémoire, et œuvrer à sa manière pour la paix dans le monde. Il s’est éteint hier, samedi 2 juillet, à l’âge de 87 ans.
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Ecrire sur l’expérience des camps d’extermination ne va pas de soi, et Elie Wiesel avait mis du temps avant de parvenir, dans un livre, à parler de l’horreur dont il avait été le témoin. Il a d’abord rédigé un texte en yiddish, qu’il a traduit en français et publié en 1958 aux éditions de Minuit, alors qu’il avait trente ans. La nuit, récit de ses souvenirs, souvenirs hallucinés de la mort des siens, préfacé par Mauriac, avait pour titre initial Et le monde se taisait. Il est constamment réédité. »Il est la source de tout ce que j’ai écrit par la suite« , expliquait Elie Wiesel en 1983, qui aimait se définir avant tout comme un écrivain.
» Un messager de l’humanité »
D’autres ouvrages en effet ont suivi, au total plus d’une cinquantaine, récits, fictions, essais, entretiens. En 1968, il avait eu le Prix Medicis pour Le mendiant de Jérusalem, et ses romans, toujours rédigés en français alors que ses autres textes pouvaient l’être en anglais, hébreu ou yiddish, ont souvent été de grands succès publics, comme Le testament d’un poète juif assassiné (Seuil, 1980) ou Un désir fou de danser (Seuil 2006).
A travers ses livres, mais aussi l’action des deux fondations qu’il avait créées, son combat était toujours le même. Raconter inlassablement, pour que ne s’efface pas la mémoire de la Shoah, pour combattre l’indifférence, et œuvrer pour le dialogue entre les peuples afin d’éviter de nouveaux génocides. Il disait s’être juré, dès la fin de la guerre: « Toujours, partout où un être humain serait persécuté, je ne demeurerai pas silencieux« .
« Inlassable défenseur de la paix »
En 1986, il avait reçu le prix Nobel de la paix et les membres de l’Académie d’Oslo avaient salué en lui un »messager de l’humanité« . Ses interventions pouvaient être critiques. Ainsi, il a très tôt dénoncé la responsabilité des dirigeants durant la guerre, notamment Churchill et Roosevelt, en affirmant qu’ils n’ignoraient rien du sort des Juifs déportés. Son choix de ne pas se taire devant les persécutions l’avait conduit à dénoncer publiquement la situation en Bosnie ou au Darfour. Mais il a aussi pu être critiqué lui-même, récemment pour avoir accordé son soutien à une association de colons de Jérusalem-Est.
Hier, le président américain Barack Obama a regretté la disparition d’ »une des grandes voix morales de notre temps et, à bien des égards, la conscience du monde ». François Hollande a pour sa part salué « l’inlassable défenseur de la paix« . Et le premier ministre israélien, Benjamin Nétanyahu, l’a défini comme « un puissant faisceau de lumière, de vérité et de dignité« .
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