Une comédie autour d’une femme en plein burn out, douce-amère mais jamais plombante et, au final, lumineuse.
Quand Aude Picault a débuté dans la bande dessinée, c’est en l’abordant selon un angle autobiographique – Moi, je, œuvre de jeunesse née dans ses carnets au milieu des années 2000 et récemment rééditée.
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Jusqu’à peu, elle se mettait souvent en scène, moins par égocentrisme que par envie d’autodérision ou d’introspection. Idéal Standard (2017) qu’elle a mis huit ans à écrire, a prouvé qu’elle pouvait se passer d’alter-ego. Nourrie par une bibliographie féministe (Virginia Woolf, Caroline Greer, Françoise Héritier), la dessinatrice avait créé un personnage romantique d’infirmière en néonatologie comme véhicule de ses interrogations ou colères.
Burn out
De la même manière, Amalia, la protagoniste de cette BD à qui elle donne son nom, employée d’une entreprise spécialisée dans la gestion de risques, paraît fort éloignée d’elle. Elle lui donne pourtant vie avec aisance, d’autant que cette mère de famille évolue dans un monde qui ressemble fortement au nôtre. Dedans, on y trouve des menaces de pandémie, des bouts de “Start-up nation” et, pendant que l’écosystème agonise – la dernière baleine vient de mourir – une fuite en avant dans la consommation. À force de se démultiplier entre son boulot, ses filles, son mari, cette héroïne du quotidien connaît un burn out – “une intolérance au rendement”, selon son médecin.
Avec cette comédie post-coronavirus à la fois acerbe et tendre, Aude Picault capte l’air du temps de manière féroce sans non plus assombrir le tableau. Pourtant, elle brocarde à tout-va : l’industrie agro-alimentaire, le modèle ambigu des influenceuses, le management absurde, les foules d’individus tristement penchés sur leur smartphone. Mais sans jamais se départir d’un humour salutaire, réservant ici ou là des surprises – Bretécher en professeure ou des personnes prénommées en hommage aux héros de Game Of Thrones. De son trait gracieux, Aude Picault impulse beaucoup d’énergie à cette tranche de vie et on entrevoit même la lumière au bout du tunnel. Un autre monde est possible, au moins en fiction.
Amalia d’Aude Picault (Dargaud), 148p., 19,99 €, sortie le 21 janvier – Exposition au festival d’Angoulême du 17 au 20 mars
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