Pour que le monde d’après ne ressemble pas à celui d’avant déjà condamné, dix BD à lire ou relire afin d’ouvrir des pistes.
Pour repenser l’agriculture : Les Algues Vertes d’Inès Leraud et Pierre Van Hove (Delcourt)
Succès surprise en librairie l’année dernière, cette enquête de la journaliste Inès Leraud mise en images par Pierre Van Hove s’impose comme une lecture indispensable pour qui veut comprendre comment un scandale sanitaire peut donner lieu à une omerta. Agriculture productiviste, politique du mensonge, disparition d’échantillon suspect… malgré 3 victimes humaines et une quarantaine d’animaux morts, la dangerosité des algues vertes a longtemps été minorée pour favoriser des gros intérêts financiers. Une BD d’investigation-choc qui fait dire : plus jamais ça !
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Pour réinventer la transmission : Ecolila de François Olislaeger (Actes Sud BD)
Le sous-titre – Fable écologique à l’usage de l’amour d’un père pour sa fille – résume bien cette émouvante bande dessinée. Avec un noir et blanc poétique, l’auteur raconte sa déambulation dans un parc mexicain avec sa fille Lila, le temps d’un après-midi. Placé sous le patronage de Thoreau ou de Llorca, Ecolila est aussi pour lui l’occasion de transmettre les souvenirs de son enfance passée à la ferme familiale. Son quotidien était alors rythmé par la traite, les moissons, les jeux avec les animaux. Un livre sur la transmission d’une relation plus organique à la nature.
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Pour repenser l’économie : Hypercapitalisme de Larry Gonick et Tim Kasser (Delcourt)
Les Américains Tim Kasser, professeur de psychologie et Larry Gonick, dessinateur, s’attaquent ici à un monstre : le capitalisme actuel. Précis, ce manuel ludique retrace l’histoire de la libre entreprise et comment elle a engendré de gigantesques sociétés monopolistiques qui menacent les libertés et engendrent des injustices sociales. Mais Hypercapitalisme propose aussi des solutions pour sortir de ce cercle vicieux et toxique. La fin du livre prend la forme d’un guide pour consommer plus responsable, guide parfaitement transposable en Europe.
Pour mieux connaître les héroïnes du confinement : Encaisser de Marlène Benquet et Anne Simon (Casterman, disponible en format numérique)
Créée il y a 4 ans, la collection Sociorama voit des travaux de sociologie adaptés en bande dessinée. Le résultat n’est jamais aride puisqu’il prend la forme d’une histoire de fiction avec des personnages auxquels s’identifier. Dans Encaisser, on suit ainsi Sabrina, nouvelle caissière dans un supermarché de l’enseigne Batax. Course au rendement, clients parfois antipathiques, syndicats complaisants avec la direction… l’album montre les coulisses d’un métier pénible où obtenir l’autorisation d’aller aux toilettes n’est pas toujours facile.
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Pour se projeter : Soon de Benjamin Adam et Thomas Cadène (Dargaud, disponible en format numérique)
“Aujourd’hui, personne n’aurait l’idée d’avoir un emballage jetable pour boire une fois”. Nous sommes en 2140 et une classe d’adolescents visite un diorama reconstituant le mode de vie du début du 3e millénaire – plus précisément l’année 2019 ! – et découvre, incrédule, une bouteille de plastique usagée. Science-fiction prospective, Soon permet non seulement de prendre du recul par rapport à la consommation actuelle mais aussi de voir le cosmos comme un espace des possibles. On y suit Simone, cheffe d’une mission spatiale avant son départ sans retour.
Pour dédramatiser l’écologie : Autobio de Cyril Pedrosa (Fluide Glacial, deux tomes, disponibles en format numérique)
Proche aujourd’hui par ses convictions du mouvement Extinction Rebellion, Cyril Pedrosa a été un pionnier de la BD touchant à l’écologie. S’il a montré qu’un autre mode de vie est possible, il l’a fait en évitant tout manichéisme et aveuglement. Au contraire, dans les deux tomes d’Autobio publiés en 2008 et en 2009, il met ses propres contradictions en scène avec beaucoup d’autodérision. Car, oui, faire son compost ou acheter un sac péruvien étiqueté “commerce équitable”, ça a ses inconvénients.
Pour repenser l’éducation : Les Grands espaces de Catherine Meurisse (Dargaud, disponible en format numérique)
Paru il y a deux ans, entamé avant l’attentat de Charlie Hebdo et La Légèreté, cette bande dessinée de Catherine Meurisse va s’imposer comme un futur classique de l’école buissonnière. Dans ce récit autobiographique où la dessinatrice se met en scène telle la Mafalda de l’Argentin Quino, elle raconte comment son enfance a été placée sous le signe de l’harmonie avec la nature mais aussi du respect pour l’art et la littérature.
Pour comprendre pourquoi les abeilles sont précieuses : Les Abeilles de Yves le Conte et Jean Solé (le Lombard, disponible en format numérique)
Ecrit par Yves Le Conte, directeur de l’unité de recherche Abeilles et Environnement et dessiné par Jean Solé, auteur historique de Fluide Glacial, ce volume de la petite Bédéthèque des Savoirs est ultra-instructif et pas seulement pour les fans de miel. Après avoir exposé les rôles de la reine, des ouvrières et du mâle (le “faux bourdon”, juste bon à procréer), cette BD claire et drôle revient sur les dangers qui menacent ces insectes, des pesticides au frelon asiatique mais insiste surtout sur leur rôle essentiel.
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Pour se rafraîchir les idées avec l’air des montagnes : Le Loup de Jean-Marc Rochette (Casterman, disponible en format numérique)
“Les chasseurs de montagne ont une relation ambiguë avec le loup parce que, au niveau de la chaîne alimentaire, on se situe au même endroit (…) Est-ce qu’il ne serait pas possible de trouver ensemble une diplomatie ?”. Dessinateur montagnard, Jean-Marc Rochette croit en une écologie “lumineuse” où l’homme vit en harmonie avec son environnement. Fiction parsemée de détails autobiographiques, Le Loup est une ode sauvage à la nature, un plaidoyer pour une alimentation en circuit (très) court.
Pour rester vigilant : La Chute de Jared Muralt (éditions Futuropolis, disponible en format numérique)
Originaire de Berne, Jared Muralt a le sens du timing. Sorti en langue française le 4 mars, le premier épisode de sa série La Chute frappe par sa puissance visionnaire. Ce qu’il a initialement conçu comme de l’anticipation (la première parution, en anglais, date de 2018) ressemble désormais à un reflet très anxiogène de notre présent. Enfin, presque : La chute c’est le monde d’après qui a mal tourné, celui où les crises sanitaire, économique, sociale ont transformé l’humanité. De la fiction si réaliste qu’elle sert d’avertissement. Si vous voulez encore plus avoir peur, Virus de Sylvain Ricard et Rica (Delcourt) prolongera l’effroi.
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