Un jour de désoeuvrement, amusez-vous à taper « érotisme » et « pornographie » dans Google. Faites défiler les pages, et vous constaterez que les réponses indiquent presque toujours une nette valorisation du premier – synonyme de beauté, de délicatesse, de désir – au détriment du second – associé à l’humiliation et à la marchandisation. La pornographie est partout […]
Un jour de désoeuvrement, amusez-vous à taper « érotisme » et « pornographie » dans Google. Faites défiler les pages, et vous constaterez que les réponses indiquent presque toujours une nette valorisation du premier – synonyme de beauté, de délicatesse, de désir – au détriment du second – associé à l’humiliation et à la marchandisation.
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La pornographie est partout mais a mauvaise réputation. Sans trouble car sans « punctum », pour reprendre la terminologie de Roland Barthes, la pornographie est vouée aux gémonies, éternelle zone refoulée de notre consommation d’images, quand l’érotisme bénéficie du prestige des grands artistes censés l’avoir honoré…
Dans un brillant ouvrage intitulé Contre l’érotisme (La Musardine, sortie prévue à la rentrée), Laurent de Sutter, auteur de l’indispensable Pornostars, fragments d’une métaphysique du X, renverse heureusement quelques fausses valeurs et redit la noblesse de la pornographie. Par une suite logique d’aphorismes, étayés par une argumentation claire et vigoureuse, il dit que l’érotisme, grande affaire du temps présent, est une prison pour la jouissance.
L’idéologie hédoniste contemporaine, à la suite de la « révolution sexuelle », n’a cessé d’assimiler la vie à celle des organes génitaux, et c’est l’érotisme – et non la pornographie, jugée impie – qui s’est chargé de la régenter, d’en régler les modalités, d’en exclure les pratiques par trop malsaines (pédophilie, zoophilie…).
Si la pornographie est rejetée par cette idéologie majoritaire et conservatrice (tout en étendant, paradoxalement, son emprise sur le monde réel), c’est qu’elle est une jouissance pure, sans objet, un formidable gaspillage d’énergie détaché de l’ordre naturel des choses. Le pornographe, nous dit Sutter, est un collectionneur insatiable et égoïste, un esthète ayant bien compris que la sexualité était une pure construction mentale sans limite. Un principe de liberté qu’il convient ici de célébrer, sans fausse pudeur ni boniments.
Jacky Goldberg
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