L’écrivain plonge ses personnages dans un futur proche où le dérèglement climatique exacerbe la folie humaine.
Après quarante ans d’écriture, Djian pourrait se reposer. Mais non. Il cherche, affine, se radicalise. Avec le temps, l’auteur de Zone érogène s’est rapproché de l’écriture scénaristique jusqu’à construire certains romans comme des séries télé. Il a travaillé l’ellipse temporelle, supprimé de sa phrase points d’interrogation et guillemets. Il a installé une géographie personnelle, agglomérations anonymes placées au bord d’un lac ou de l’océan, grandes villas séparées par des pelouses. Il a su imaginer des héroïnes de plus en plus intéressantes et complexes.
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Et le voilà aujourd’hui qui tente l’anticipation. Dans son nouveau roman, Djian a envoyé ses personnages en 2030 se faire cuire par un soleil de plomb.
Ambiance électrique
Dans cette ambiance encore plus électrique que dans ses textes précédents, il dissémine des éléments récurrents qu’il renouvelle chaque fois par d’infimes variations : un beau-frère caractériel, une femme renversante mais imprévisible, des ados ingérables, et un personnage principal, solitaire et furieux du début à la fin du livre, qui tente de rendre vivable ce monde devenu fou. Greg s’engueule avec ceux et celles qui l’entourent et porte le fardeau d’un passé douloureux, dont il parle peu.
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Tout est coloré d’une urgence oppressante, car entre dérèglement climatique et attentats, Djian met face à face des écolos activistes et des industriels corrompus, dans le livre le plus politique qu’il ait jamais écrit. Mais au milieu de tout ce bazar, un soir, Greg se sert un Get 27.
C’est ça, Philippe Djian. Et c’est pour ça qu’on l’aime. Pour sa façon de glisser des détails qu’il est le seul à pouvoir imaginer. En 2030, il y aura toujours quelque part un homme fatigué qui boit du Get 27 en regardant sa pelouse par la baie vitrée de son salon. Alors le monde peut bien s’enflammer, on sait que Djian continuera à écrire, et à nous entraîner encore et encore dans ses histoires pas possibles et pourtant si vraies.
2030 de Philippe Djian (Flammarion), 256 p., 20 €
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