Relancée en 2018 dans un style plus sérieux et varié, la série d’action de Sony revient avec un nouvel épisode très abouti centré sur la mythologie nordique.
Conan le Barbare, mais par Ingmar Bergman. On exagère un peu (beaucoup), mais il y a de ça dans le sentiment procuré par les premières séquences de God of War: Ragnarök, nouveau volet de la saga mythologique de Sony, le deuxième depuis son virage “sérieux” sous la houlette de Cory Barlog.
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Le rythme est lent, les corps lourds, les visages marqués, les mots rares et choisis. C’est tout juste si on reconnaît encore cette grosse brute de Kratos depuis qu’en plus d’être devenu père, il s’est laissé pousser une âme.
Vice Versa pour les grands
Et puis si, finalement. “On se remet à tout casser pour le plaisir et le profit ?”, raille Mimir, le dieu nordique de la sagesse réduit à une tête à cornes que notre héros trimballe à sa ceinture. Donc, oui, dans Ragnarök, on casse et on massacre quand même énormément. Il y a des coups de hache et beaucoup de sang, mais pas mal d’autres choses aussi qui, pour une fois, font directement écho aux avancées graphiques découlant du passage de la série sur la puissante PS5.
L’image 4K donne une impression de densité aux lieux que Kratos traverse en compagnie de son fils, les montagnes enneigées, le royaume des nains où l’on débarque après une petite traversée en canot… Comme s’il y avait du vrai et du profond, du trouble et de la contradiction sous la surface épique et bagarreuse. De fait, derrière la rage, il y a la peur, le chagrin, les doutes et l’espoir qui affleure à la surface, heureusement. Et si Ragnarök était un Vice Versa pour les grands ?
Détendre l’atmosphère
Blockbuster PlayStation annoncé de la fin d’année, God of War impressionne par sa manière de grandir (dans tous les sens du terme : l’aventure s’étend sur des dizaines d’heures) sans se renier. Il ne s’agit pas de refuser le grand spectacle ultra-violent qui a fait le succès des premiers volets de la série, mais d’en questionner les fondements en se plaçant dans l’après.
Après la naissance d’un enfant, la disparition de la femme aimée, le changement de vie (et de décor, de la Grèce à la Scandinavie) ; après l’arrivée de consoles permettant d’ouvrir et d’étendre l’expérience de jeu sans faire de compromis, aussi. Ce qui n’implique pas pour autant de tourner le dos à toute fantaisie, ou même au mauvais goût et à la bouffonnerie. Certaines créatures affrontées, tels les trolls, se révèlent par exemple plaisamment répugnantes, et l’ami Mimir est toujours là pour détendre l’atmosphère.
S’il y a du Zelda dans ce Ragnarök (le rapport à l’espace, les énigmes, l’enchevêtrement de quêtes facultatives et nécessaires) et du Uncharted (pour le goût de l’aventure et la souplesse de ses dispositifs), le plus révélateur est peut-être son dialogue à distance avec Elden Ring, un voyage solitaire et cryptique dans un monde fabuleux qui nous toisait de haut. Ragnärok, lui, nous accueille à bras ouverts et replace l’humain au centre de tout. “Derrière toi ! Attention !”, crie le fils à son père qui, peu après, lui rendra la pareille. Unis pour tant d’horreurs, tant de merveilles.
God of War: Ragnarök (Santa Monica Studio/Sony), sur PS4 et PS5, de 60 à 80 €.
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