Le scénariste de Sicario poursuit son exploration de l’Amérique des marges avec cette enquête parfois scolaire mais attachante dans une réserve indienne.
De l’aveu même de son auteur, Taylor Sheridan, Wind River forme une trilogie avec Sicario et Comancheria, dont il a signé les scénarios mais laissé la mise en scène à d’autres (respectivement Denis Villeneuve et David Mackenzie). De ces trois polars, qui chacun s’intéressent à un type de flics (stups pour le premier, rangers texans pour le deuxième, alliance entre le FBI et la police indienne dans celui-ci) et à un “territoire abandonné de la République”, comme on dirait en France (la frontière mexicaine tenue par les cartels, puis les campagnes ravagées par la crise et, ici, une réserve indienne en haute montagne), Wind River est le moins inspiré, sans toutefois être déshonorant.
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Jeremy Renner (un chouïa paresseux en chasseur taciturne) et Elizabeth Olsen (plus convaincante en Miss Détective) y collaborent pour élucider le meurtre sordide d’une jeune Native American retrouvée gelée, pieds nus, à des kilomètres de toute habitation. A travers cette enquête qu’il déroule de façon un peu scolaire, Sheridan dresse le portrait d’une Amérique des marges qui paradoxalement en constitue le cœur : la dèche n’y est pas l’exception mais la règle, le mal non pas un phénomène terrifiant et métaphysique (comme chez les Coen) mais une éruption cutanée, banale, systémique.
Un auteur naturaliste
Sheridan s’affirme comme un auteur naturaliste, au sens zolien du terme, étudiant comment le milieu social détermine les comportements. Les meilleures scènes de Wind River s’attachent ainsi à décrire les déplorables conditions de vie auxquelles sont contraints les Indiens, mais on aurait souhaité que le réalisateur s’attarde davantage sur celles des prolos blancs eux aussi coincés sur cette terre inhabitable. Sheridan est en tout cas là pour durer, puisqu’il a signé la suite de Sicario, le remake de Maryland d’Alice Winocour et une série sur un ranch au Wyoming, avec Kevin Costner.
Wind River de Taylor Sheridan (E.-U., 2017, 1 h 50)
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