Après Le Seigneur des Anneaux, Viggo Mortensen fait des étincelles dans A history of violence. Et il s’est trouvé un nouveau meilleur ami : David Cronenberg.
Il est pieds nus dans les couloirs de l’hôtel parisien où se donnent les interviews et se glisse dans la chambre de Cronenberg pour lui faire un petit bisou. Et ça continuera ainsi pendant toute la promotion du film : dès qu’ils se retrouvent, pour une avant-première à la Cinémathèque ou un dîner dans un restaurant éthiopien de la capitale, les deux hommes affichent une étonnante intimité physique, multipliant les marques d’affection et les signes de la plus totale complicité. Tête d’affiche dans A History of Violence, Viggo Mortensen semble avoir noué avec son metteur en scène une relation fusionnelle. Les deux hommes confirment. Très calmement du côté de David, qui rappelle qu’il s’est toujours très bien entendu avec ses premiers rôles, de Christopher Walken à Ralph Fiennes, en passant par Jeremy Irons. Plus lyrique pour Viggo, qui affirme vivre pour la première fois une histoire si forte avec un cinéaste et trouver enfin les raisons pour lesquelles il est devenu acteur. Malgré un physique et un enthousiasme de jeune premier, Viggo Mortensen a déjà 47 ans, le jour même de l’interview (le 20 octobre). C’est qu’il a pris son temps, refusant de tout donner au métier d’acteur, mais multipliant en parallèle les voyages, et d’autres activités artistiques : peinture, musique, photographie, poèmes. Il dirige même une maison d’édition, qui a publié notamment City of Quartz de Mike Davis. Au cinéma, on l’a découvert en rescapé du Vietnam dans The Indian Runner de Sean Penn, en 1991. Il a enchaîné depuis les seconds rôles chez De Palma (L’Impasse, 1994) ou Gus Van Sant (Psycho, 1998), mais c’est évidemment la trilogie du Seigneur des Anneaux qui a fait de Mortensen une star. Mais une star atypique, qui, durant la promo de la trilogie gothico-kitsch, profitait de l’énorme exposition dont il bénéficiait pour arborer des T-shirts anti-Bush et militer contre l’engagement militaire en Irak.
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DAVID C.
« Si je devais choisir un adjectif pour qualifier ma relation avec David Cronenberg, je pense que ce serait : fraternelle. Ça a été tout de suite très simple entre nous. Dès qu’on s’est mis à parler du film, on a senti à quel point nous étions proches, de la même sensibilité. C’est rare. Nous rions aux mêmes choses, nous trouvons les mêmes choses ridicules ou absurdes. Nous avons les mêmes préoccupations. Par exemple, sur le scénario, nous avions exactement les mêmes appréhensions. Jusqu’ici, les metteurs en scène avec qui j’ai travaillé étaient beaucoup plus jaloux de leurs prérogatives. J’en déduis que David est plus fort qu’eux : il n’a pas peur d’écouter un autre point de vue que le sien. »
LE FILM
« En apparence, A History of Violence est très simple, mais plus vous y pensez, plus vous découvrez qu’il y a plusieurs couches, et que ce que nous dit David sur l’être humain est complexe. J’aime beaucoup la direction que prend son cinéma : ne plus seulement ouvrir le corps de l’homme, mais aussi son cerveau, et de façon de plus en plus métaphorique. Cela dit, j’ai revu tous ses films avant de tourner celui-là, et il y a d’évidentes passerelles entre The Dead Zone et A History of Violence, dans le ton, mais aussi dans le choix de la saison, des couleurs des feuilles dans les arbres… »
LA VIOLENCE
« David et moi sommes très sensibles à la façon dont l’Amérique a exporté sa mythologie de la violence, de la justice, de l’individualisme, en particulier via les westerns. Cela dit, je ne pense pas que la violence, et plus généralement l’impérialisme, soit une spécificité américaine. Ça vaut pour l’époque actuelle, mais la France de Napoléon était-elle si différente de ça ? Et il y a eu des époques où des pays comme l’Espagne, l’Angleterre ou l’Italie ont fait fort eux aussi. Le propos du film s’étend donc au-delà de la seule Amérique contemporaine. »
SA MAISON D’ÉDITION
« J’ai d’abord monté la maison d’édition Perceval Press pour publier mes poèmes, mes photos et mes disques. Cet hiver, par exemple, je sors Linger, un livre de photos en noir et blanc et de textes, mais aussi mon septième CD, Intelligence Failure, que j’ai coécrit avec Buckethead. De fil en aiguille, je me suis mis à publier d’autres que moi qui ne pourraient pas être édités ailleurs, comme Lindsay Brice (Supernatural), Stanley Milstein ou David Newsom (Skip). Mais c’est une toute petite maison. Je n’ai pas l’intention de l’amener à une taille industrielle. Au contraire, c’est vraiment une structure que je m’offre pour pouvoir y publier des textes, des disques ou des livres de photos sans jamais avoir à me soucier de rentabilité. »
LA RÉALISATION
« J’y pense bien sûr : j’adore raconter des histoires, j’adore l’image, la photo. Mais je veux le faire bien. Donc j’attends le moment. Il me semble que la pire erreur serait de se précipiter. J’ai quelques idées. Mais je ne veux pas me contenter d’un trou de trois mois dans mon emploi du temps d’acteur. Il faut pouvoir y passer au moins deux ans. »
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