Notre sélection de DVD et téléchargements mensuelle à ne pas louper : des films japonais, une comédie de vampires et Max Pécas le roi du nanar.
Love Exposure/Guilty of Romance/Saudade/Tokyo Park
On n’écrira pas le mot « tsunami » mais cela fait beaucoup de films japonais contemporains ce mois-ci, parmi les plus passionnants, qui débarquent en DVD. Avant la sortie de son nouveau film Land of Hope en avril, on pourra réviser la filmo du poète punk chapeauté Sono Sion. On prend de l’avance car son Love Exposure (2008) dure à peu près quatre heures et concentre toutes les obsessions de l’artiste (sexe, fuck attitude, humour noir, sexe) dans un soap opera acide et barré : un jeune homme vertueux y commet tous les péchés possibles pour alimenter les confessions faites à son papa prêtre. À partir de là, tout est possible et surtout le meilleur, bagarres, travestissements, blasphèmes et beaucoup de panchira, ce fétichisme nippon de la petite culotte que tous les français connaissent depuis le Club Dorothée et ses dessins animés.
Si vous en voulez encore, continuez avec Guilty of Romance (2011) du même Sono Sion. Michelangelo Antonioni avait commis Identification d’une Femme : voici « Identification d’un tronc de femme », première image de ce film-puzzle érotique sanglant où la recherche du nom de la victime est prétexte à une descente dans le milieu du stupre tokyoïte, au cœur de ténèbres constamment éclaboussées par les tabous et les désirs interdits. Très graphique et hautement recommandé aussi.
http://www.youtube.com/watch?v=i5_IzJMbfgg
Saudade de Katsuya Tomita est moins long que Love Exposure mais dure quand même 2h47. Plus réaliste, ce film découvert au Festival de Locarno en 2011, s’attache aux laissés-pour-compte de la société japonaise, ni kawaii ni otaku : juste des ouvriers qui veulent bosser et gueulent leur malaise le soir en rappant. Originalité du film dans un cinéma nippon en général autocentré : la présence de travailleurs immigrés brésiliens, eux aussi dans la dèche et dans le rap. Le saudade du titre, cette fameuse mélancolie à la portugaise, est générale dans ce film bricolé, fait avec pas grand-chose, mais ample. Le film est tourné à Kofu, à une centaine de kilomètres de Tokyo : elle ne paye pas de mine, mais est traitée en vrai personnage, aussi cabossé et hagard que ses habitants. Son réalisateur connaît bien ce qu’il filme : dans la vie, il est chauffeur routier.
Plus doux en apparence mais tout aussi sonné, Tokyo Park (2011) de Shinji Aoyama commence comme une promenade au parc, une séance photo en plein air, un mari jaloux et une filature, pour bifurquer vers une histoire de miroirs d’alouette et de deuils impossibles. Tout a l’air de flotter dans ce film, les chagrins comme les mystères. Bref, autant de destinations différentes dans ces films pour un même Japon d’aujourd’hui, aux humeurs diverses. Pour avoir un vrai goût nippon nuancé, évitez le faux resto japonais en bas de chez vous avec ses menus A4 ou B6 avec brochettes + sushi et restez à la maison avec ces DVD.
Love Exposure disponible en DVD et Blu-Ray chez Metropolitan Video
Guilty of Romance disponible en DVD chez Zylo
Saudade disponible en DVD chez Alfama Films
Tokyo Park disponible en DVD chez Alfama Films
Vamps d’Amy Heckerling
On doit à la réalisatrice Amy Heckerling trois films importants de la comédie américaine des années 80/90. Importants pour différentes raisons : Ca chauffe au lycée Ridgemont (1982), fine teen comedy au casting de futurs stars (Jennifer Jason Leigh, Forest Whitaker, Nicolas Cage et Sean Penn drôle, oui, drôle) ; Allô maman, ici bébé (1989), énorme carton (vide) avec Bruce Willis en voix off du bébé qui parle (et Daniel Auteuil dans le version française) ; Clueless (1995), l’un des mètre-étalon du film de blonde petite fille riche (bien avant La Revanche d’une Blonde), avec Alicia Silverstone sous le brushing. Vamps marque les retrouvailles de Silverstone et Heckerling, dont la carrière a eu un passage à vide depuis, même si on la remercie d’avoir produit le génial Une Nuit au Roxbury (1998), sommet d’idiotie avec Will Ferrell. Pas de suspense : les deux héroïnes de Vamps (2012) sont bien des vampires, bonne copines (il le faut, quand on a l’éternité devant soi). Sous ses gags aux références de bon goût (grand écart entre l’expressionnisme allemand et Jersey Shore), le film joue joliment sur la nostalgie, le temps qui passe, les années 80 comme le 19e siècle. Alicia Silverstone et sa best friend Krysten Ritter ont ainsi l’air d’avoir le même âge, mais un siècle les sépare. Puis le scénario vire Twilight avec un vampire en cloque et une méchante reine vampire à tuer (Sigourney Weaver) pour se reprendre en un bel hommage au New York d’hier et d’aujourd’hui
http://www.youtube.com/watch?v=I22Lqr9IRKY.
Disponible en DVD chez Metropolitan Video
La Pivellina de Tizza Covi et Rainer Frimmer
Attention, crève-cœur. Dans La Pivellina (2009) de Tizza Covi et Rainer Frimmer, une gamine abandonnée par sa mère est recueillie par un couple de vieux saltimbanques dans la banlieue romaine. Le petit miracle de ce film italo-autrichien est de faire grand avec peu : un pitch de mélo dégoulinant entre de mauvaises mains, des acteurs amateurs, une caméra quasi-documentaire. Mais l’émotion naît dans la relation tâtonnante, généreuse et éphémère entre la petite (la pivellina du titre, littéralement la jeunette, la petiote) et les adultes, ainsi que dans le quotidien de cette bande de gens du cirque très dignes, mais ayant connu des jours meilleurs. Sans chichi, avec comme seul effet les yeux d’une gosse et l’impossible crinière rouge de la dame qui la protège, La Pivellina est le genre de mélo anti-spectaculaire de prime abord, mais on peut préparer son paquet de kleenex dès le générique du début.
Disponible en VOD
Je suis une nymphomane de Max Pecas
On est venu là pour s’éclater, Mieux vaut être riche et bien portant que fauché et mal foutu, Belles, blondes et bronzées, Les Branchés à Saint-Tropez, Deux enfoirés à Saint-Tropez ou On se calme et on boit frais à Saint-Tropez : ce sont les titres des navets immortels, pseudo-comiques, ensoleillés et très tartes (tropéziennes) de Max Pecas dans les années 80. Le cinéaste eut bien avant une carrière dans le film érotique avec des titres presque aussi définitifs que La Nuit plus chaude, Sexuellement Votre, Je suis frigide… pourquoi ? (notez l’importance des points de suspension) et ce Je suis une nymphomane (1971). L’argument est simple : Carole est frigide, et devient nympho après une chute (Pecas affirma que l’idée lui fut inspirée par un cas aux Etats-Unis, celui d’une femme devenue nymphomane après avoir été renversée par un bus). Le film se regarde comme un roman-photo jazzy pas désagréable, avec du voile, des filtres et kaléidoscopes et une voix off genre Le jour où tout a basculé. Un précis des fantasmes sous les années Pompidou, l’envers des films de Claude Sautet. A voir donc comme un docu.
Disponible en DVD chez LCJ Editions