Deux cheminots à la poursuite d’un train bourré d’explosifs. Du cinéma d’action formellement brillantissime.
Il y a un peu plus d’un an, L’Attaque du métro 123 s’achevait sur le triste constat que Tony Scott, après une décennie à rugir dans le tourbillon des nouvelles images (d’Ennemis d’Etat à Déjà vu), ne parvenait plus à mettre son savoir-faire à jour, se complaisant dans la reprise paresseuse de schémas usés – “Il a désormais un train de retard”, concluions-nous à l’époque.
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Qu’à cela ne tienne : si le train est parti sans lui, semble-t-il ici répondre, il va tout faire pour le rattraper, et le dépasser.
Cette volonté est littéralement le moteur d’Unstoppable : alors qu’un train rempli de produits chimiques s’élance à toute allure et sans pilote dans la Pennsylvanie prolétaire, menaçant de détruire une ville, deux cheminots désobéissants (Denzel Washington et Chris Pine) se lancent à sa poursuite.
Ce simplisme volontaire du scénario permet à Tony Scott de s’adonner à ce qui lui plaît vraiment – fracasser des images contre d’autres images –, faisant la synthèse parfaite de ses récits de mavericks désobéissants mais aptes à sauver la nation (USS Alabama et Top Gun) et de ses films plus théoriques sur la résistance de l’actuel sur le virtuel, de l’ancien sur le nouveau (Domino, Déjà vu).
Le programme est encore plus clair ici, puisque ce runaway train au chiffre porte-bonheur (777), que Scott filme comme une pièce de musée (comment ne pas penser au début de La Bête humaine de Renoir ?), symbolise une classe ouvrière bafouée, reléguée hors de la photo (et donc de la fiction) par des actionnaires cyniques et dépassée par des événements que les caméras-moustiques de Fox News ne parviennent plus vraiment à relater.
Seuls quelques cheminots droits et fiers, cow-boys hawksiens au professionnalisme sans faille, se révèleront capables de maîtriser ce monstre ivre de vitesse. “Nous chanterons les locomotives au grand poitrail, qui piaffent sur les rails, tels d’énormes chevaux d’acier bridés de longs tuyaux”, écrivait Marinetti en 1909 dans Manifeste du futurisme. Un siècle plus tard, il s’est trouvé un brillant continuateur.
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