Une comédie romantique ado dont l’extrême sensibilité la préserve de ses dérives hype.
Dans son premier long, Long Way Home (2002), Peter Sollett dépeignait, avec une rare honnêteté, une bande d’adolescents latinos à New York. L’été y était corps moites, propice aux émois, mais son film ne transpirait jamais le moi (j’en veux) d’un Larry Clark, qui préfère souvent piquer sur ses jeunes proies plutôt que rester en vol d’observation. Une nuit à New York mesure encore l’énergie ado du même quartier (le Lower East Side) avec d’autres instruments, une autre échelle : un genre (la comédie romantique), un studio (Columbia), une star (Michael Cera, le “little big man” de Supergrave et Juno) et une volonté de surfer sur le zeitgeist via sa BO pop-rock indé – une approche qui n’est pas sans rappeler ce que fait Josh Schwartz avec ses séries TV Newport Beach et Gossip Girl. Ici, les personnages du titre original (Nick and Norah’s Infinite Playlist) jouent au chat et à la souris une nuit de concerts. Les playlists, la pop-rock comme espéranto se substituent aux lettres d’amour, et savoir si Richard Hawley succède aux Raveonettes est plus important que porter la bonne jupe.
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Pendant un moment, Une nuit à New York paraît respirer le calcul, un Haute fidélité pour ados. Son générique mime ces pages de cahiers qu’on coloriait pendant le cours de maths avec le nom de ses groupes favoris. Les références (les Spice Girls et Hot Chocolate sont le mal), les jolis minois y sont donc comme il faut, parfois trop, et on craint que Sollett ait abdiqué, après avoir, durant six ans, soigneusement évité le mainstream. Mais le cinéaste s’en tire par sa sensibilité préservée pour les ados : une fois déserté par des personnages un peu en trop – les rockers gays, qui auraient pu être des sorcières à la Macbeth, ou la copine ivre, croisement de Britney Spears pour la tête et Will Ferrell pour les vomissements –, Une nuit à New York ménage de beaux moments grâce à l’alchimie de son couple vedette. On ne louera jamais assez Cera (Nick), dont les gaucheries, la manière de courir et sa voix, qui a hésité à muer, respirent la fraîcheur. Les yeux lourds de Norah (la protogothique Kat Dennings et sa mouche adorable) et ceux écarquillés de Nick sont les fenêtres idéales où regarder temps et sentiments à la fois suspendus et s’accélérer : ces signes immanquables de l’état second des longues virées aux heures indues.
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