Avant tout, il y a ce titre répété comme un programme, usant pour premier racolage d’un terme dangereux qu’il est prié de ne pas galvauder, et qu’il vaut mieux savoir employer sans quoi il vous gicle à la gueule. A fortiori, que peut avoir de pornographique une liaison engageant Nathalie Baye et Sergi Lopez […]
Avant tout, il y a ce titre répété comme un programme, usant pour premier racolage d’un terme dangereux qu’il est prié de ne pas galvauder, et qu’il vaut mieux savoir employer sans quoi il vous gicle à la gueule. A fortiori, que peut avoir de pornographique une liaison engageant Nathalie Baye et Sergi Lopez le Daniel Auteuil ibérique ? Comment ça bande, le cinéma du consensus mou ? Et surtout, qu’est-ce que c’est une liaison pornographique, existe-t-il quelque chose qui soit porno par essence ? Une fille photographiée dans une revue de cul ou la voix du Rod Stewart de Da ya think I’m sexy sont pornos pour ce qu’ils continuent, jambes écartées et lippes grandes ouvertes, de nous dévisager, de nous surprendre en voyeurs. Droit dans les yeux, avec plus ou moins de honte, de don, de sacrifice ou de rage fière. C’est ainsi : il n’y a pas de pornographie sans regard, sans regards échangés, volés ou surpris. Or, Frédéric Fonteyne détourne les yeux, pieusement. Il ne filme pas, il se lève pour éteindre la lumière. Hypocrite bondieusard, il refuse le porno, il en espère juste la publicité (elle ne salit pas). Il ne recherche pas la jouissance du porno, la descente aux enfers, il n’en veut que l’usufruit immédiat. Non seulement ses personnages ne nous montreront rien, mais pire ils ne se montreront rien, ne s’offriront pas mutuellement en sacrifice : « Ne me regarde pas jouir », répète Ba-Baye à son partouzard recruté sur 36 15 Turlututu. Lorsqu’une voix (inquisitrice, télé) voudra savoir autour de quoi ça tournait, leur affaire pornographique, leur fameuse petite spécialité, leur petit risque, N. B. répondra, toujours aussi hors sujet, qu’on « en a rien à faire de savoir ce que c’était ». Elle a raison. Il y a longtemps qu’il n’y a plus personne pour se soucier de leur truc, comme il n’y a jamais eu personne ici pour filmer qui que ce soit, personne sous ces draps, personne sous ces mots tocs, personne pour habiter ces rendez-vous qui ne renvoient à rien d’autre qu’à ce déni de pornographie : « On fait un truc (pornographique) que vous ne verrez pas ! » Romance bourgeoise, ce film représente la France à Venise. Il n’est pas nul, il est pire : il est vide. Il ment, c’est son pauvre délit. Remarquez, il est peut-être conceptuel : le grand vide, le trou noir, la béance, le corps caverneux, l’absence totale, le rien, c’est ça le porno ultime, non ?
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