La renaissance du dernier chef-d’oeuvre d’Orson Welles, mise en lumière par une possible sélection aux Oscars, révèle la capacité qu’avait son réalisateur à susciter des vocations, et à perpétuer son art à travers d’étroits collaborateurs.77 ans après « Citizen Kane », « The Other Side of the Wind », film inachevé d’Orson Welles, est remis en lumière par le Festival de Venise et une possible sélection aux Oscars
Passer de l’ombre à la lumière, telle a toujours été la devise d’Orson Welles, tant dans sa mise en scène, toute en clair-obscur, que dans son parcours créateur semé d’embûches. En témoigne son dernier film, The Other Side of the Wind, tourné entre 1970 et 1976, qui semble s’offrir une série de secondes vies, après être resté longtemps dans l’ombre, parce qu’inachevé.
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Si cette renaissance du film paraît d’autant plus spectaculaire, c’est qu’elle est permise par de nouveaux acteurs économiques, ceux-là même qui ont peut-être manqué à Orson Welles à l’époque (selon le réalisateur, le film ne serait pas sorti à cause de son associé, qui aurait pendant longtemps bloqué les fonds du film). C’est en effet Peter Bogdanovich qui, en entreprenant de remonter le film selon les désirs de Welles, a permis par la suite que Netflix puisse financer sa restauration et annoncer sa mise en ligne le 2 novembre prochain.
De retour sur le tapis rouge, 77 ans après Citizen Kane
Après avoir été présenté en séance spéciale au 75e Festival de Venise, la visibilité du film est de nouveau mise en jeu, puisqu’il est question que cette nouvelle version soit représentée aux Oscars. Convoquer ainsi un réalisateur dont la présence unique dans l’histoire des Oscars remonte à 1941, alors qu’il remporte l’Oscar du Meilleur Scénario Original pour Citizen Kane. Une tentative de réhabilitation, non seulement du réalisateur, mais aussi de tous ceux qui, gravitant autour de lui, se sont fait les héritiers de son art, Peter Bogdanovich le premier, qui ont permis la restauration du film.
Le fait que le film soit pressenti, selon Variety, pour être nommé dans la catégorie Meilleur montage, souligne la dimension collective du geste de montage dans l’œuvre de Welles : avant Peter Bogdanovich, Bob Murawski avait tenté de reconstituer la pensée foisonnante de Welles à partir d’images déjà montée et de notes manuscrites. Un prix, qui, en somme, serait autant un hommage au réalisateur qu’à sa capacité à générer autour de lui des successeurs…
Ironie
Les autres potentielles nominations expriment aussi cette idée d’une œuvre pleine de constellations, de passerelles entre des collaborateurs multiples : Gary Graver, photographe attitré de Welles, pourrait être nommé pour son travail sur la photographie, ainsi qu’Oja Kodar, qui a co-écrit le scénario avec Welles. Enfin, une nomination pour la bande-originale de Michel Legrand est envisageable, lequel avait déjà travaillé avec Orson Welles sur Vérité et Mensonges en 1974. S’il remportait l’Oscar, ce serait alors le quatrième trophée pour le compositeur français.
Mise en abyme tragique et ironique d’un scénario qui semble reproduire en son sein la trajectoire de son auteur : The Other Side of the Wind narre en effet le come-back à Hollywood, après des années d’errance, d’un réalisateur qui tente d’achever l’œuvre de sa vie…
Le film sera disponible sur Netflix le 2 novembre 2018.
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