Un conte de la folie ordinaire adouci par la cocasserie lunaire d’Alberto Sordi.
On a beaucoup glosé sur le néoréalisme, sur sa noble descendance, mais pas assez sur la comédie italienne des années 1950-80, formidable vivier comique, inépuisable mine satirique. Mario Monicelli fut un de ses auteurs phare qui, dans ses meilleurs moments, sut magnifier la cruauté humaine avec une rare acuité.
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Ici, bien avant de diriger Alberto Sordi dans son célèbre Un bourgeois tout petit petit, le cinéaste le met en scène dans une farce assez impitoyable contre la société de “son temps” (cf. titre piqué à un roman de Lermontov, auquel le film ne ressemble guère).
Monicelli tisse une tapisserie de la folie ordinaire
Principal vecteur de l’ire monicellienne : le héros, Alberto, homme sans qualités affligé de toutes les tares – lâche, menteur, délateur, immature et probablement puceau, vivant avec ses vieilles tantes. Figure odieuse que la bonhomie et la faconde de Sordi rendent charmante – et évidemment drôlissime.
La paranoïa permanente de ce méga faux-jeton est le moteur d’un récit mis en scène sans génie mais bourré d’idées et de séquences tissant une tapisserie de la folie ordinaire. Outre la peur panique déclenchée par une parole intempestive ou un objet oublié (une paire de chaussettes), l’incongruité règne (Alberto doit porter un chapeau en permanence). Monicelli n’hésite pas à pousser des situations anodines au bout de leur logique (Alberto opéré d’une hernie pour rien).
La méfiance est partout
L’inquiétude se diffuse dans tout le film, au-delà de son héros. Bien avant que les Brigades rouges ne fassent trembler l’Italie, le terrorisme semble prégnant. La méfiance est partout. Le patron, mini Big Brother incarné par le cinéaste Alberto Lattuada, espionne ses employés avec des micros…
Bref, Monicelli utilise génialement et avec légèreté des ressorts quasi policiers pour susciter le rire. Prolongement piquant des Vitelloni de Fellini, le film tire énergie et saveur de sa litanie de malaises et de dysfonctionnements sociaux.
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