Plongée dans l’histoire secrète du Front national à travers une fresque romanesque, sensible et cinglante.
Avant même sa sortie en salle, le nouveau film de l’écrivain, metteur en scène et musicien Diastème a attisé une vive controverse, l’auteur ayant fait état de nombreuses menaces reçues sur les réseaux sociaux depuis
la diffusion de la bande-annonce. Une polémique, sans doute alimentée par les nervis de l’extrême droite, qui aura au moins eu le mérite d’éclairer les réelles intentions du film, pamphlet radical contre la vieille pensée nationaliste et ses ramifications contemporaines.
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Sur le modèle d’une longue fresque historique, Diastème y restitue le parcours du skinhead Marco (Alban Lenoir, parfait d’opacité brute), pur produit des cités blanches des années 80 nourri au racisme et à la violence. De sa jeunesse militante à sa lente prise de conscience, que le film a l’intelligence de ne jamais vraiment expliciter, Un Français raconte l’histoire d’une rémission, une sorte de roman d’apprentissage qui pourrait être le négatif assombri et plus classique du récent Eden.
Entre le film de Mia Hansen-Løve et celui de Diastème se dessine une même volonté d’hybrider la reconstitution d’époque hyper documentée et le romanesque échevelé ; une même construction narrative, tout
en ellipses brutales ; et surtout un même portrait sensible d’un homme hanté par sa jeunesse. Mais si le héros d’Eden vivait suspendu aux souvenirs d’un paradis perdu, celui d’Un Français tente à l’inverse de s’affranchir de sa jeunesse extrémiste, de liquider cette souffrance dont il fut l’un des nombreux héritiers.
Diastème dresse une généalogie de la pensée frontiste
La grande idée du film repose sur ce motif de contamination individuelle et collective qui consiste à faire de l’extrême droite une immuable maladie française, dont le nom évolue mais les symptômes demeurent. Recourant à tout un système d’inserts (flashes d’actualité, unes de journaux…), Diastème dresse une sorte de généalogie saisissante et subversive de la pensée frontiste, qui n’hésite pas à faire des marcheurs de la Manif pour tous et des garants de la droite décomplexée les rejetons directs des boneheads.
Le geste souffre de quelques forçages scénaristiques, façon Jacques Audiard, et d’effets spectaculaires un peu complaisants tentant de bousculer une mise en scène fonctionnelle, mais il constitue l’une des plus vives et audacieuses réponses à l’idée d’un FN lyophilisé et respectable.
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