Les amateurs de Bilal/auteur de bandes dessinées ne seront pas dépaysés par le second long métrage de Bilal/metteur en scène, après Bunker Palace Hotel en 1989. Outre la déclinaison plastique de cet univers immédiatement identifiable, on retrouve ses thèmes de prédilection : personnages isolés dans une mégalopole grise et kafkaïenne où règne un régime politique […]
Les amateurs de Bilal/auteur de bandes dessinées ne seront pas dépaysés par le second long métrage de Bilal/metteur en scène, après Bunker Palace Hotel en 1989. Outre la déclinaison plastique de cet univers immédiatement identifiable, on retrouve ses thèmes de prédilection : personnages isolés dans une mégalopole grise et kafkaïenne où règne un régime politique totalitaire, couple d’amoureux emblématiques qui parviennent à triompher de l’étau implacable d’une intrigue policière futuriste. Dans les BD, les scénarios semblaient déjà un peu légers, mais grâce à l’imaginaire de la lecture, cela fonctionnait. Là, le film dure 1 heure 47 et on a le loisir de repérer les faiblesses de l’intrigue, voire de trouver le temps long. Politiquement par exemple, la satire est un peu courte, opposant dans un raisonnement résolument binaire démocratie et tyrannie. A l’heure des grandes confusions idéologiques, on est en droit d’attendre davantage. Et les références écrasantes à Ubu ou Falstaff ne font que mettre en perspective la pauvreté du propos. Mais Bilal, c’est d’abord une esthétique. C’est au niveau des acteurs que la transposition est la plus convaincante. Bilal a su réunir une distribution qui s’intègre parfaitement à son univers. Le couple Julie Delpy (perruque rouge, peau ivoire)/Johan Leysen (traits burinés, nez aquilin) semble tout droit sorti d’un de ses albums. Et Michel Piccoli (dictateur au sang littéralement bleu, schizophrène et paranoïaque), Marie Laforêt (épouse à l’accent russe et à la bouche énorme), ou Richard Bohringer (tueur philosophe et fatigant), s’ils font tous leur numéro, ne dépareillent pas. En revanche, côté décors, le film souffre des coupes budgétaires : le Paris reconstitué sur la Lune donne dans le bricolage approximatif et beaucoup de scènes sentent le studio de manière rédhibitoire. Mais le passage au grand écran bénéficie également de quelques bonus comme l’excellente BO de Goran Vejvoda, ainsi que la sublime chanson Mister Sun interprétée avec toute l’incandescence requise par Brigitte Bardot. Lorsque Bilal filme les déplacements en side-car du couple Delpy-Leysen, il parvient à donner du mouvement à un film par ailleurs un peu figé. Après tout, peu de réalisateurs peuvent se targuer d’être identifiables dès le premier plan. Même si ici on perçoit en Bilal davantage un plasticien qu’un cinéaste.
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