Malgré toutes ses bonnes intentions, une plongée très sage dans l’univers des drag queens.
Quelques mois après le phénomène estival Drag Race France, adaptation de l’émission culte et queer américaine de RuPaul, la sortie de Trois nuits par semaine vient prolonger le phénomène de déchiffrage d’un milieu aussi longtemps incompris que délaissé par les images que celui des drag-queens. Une entreprise hautement louable et d’autant plus rassurante qu’elle est initiée derrière la caméra par Florent Gouëlou, performeuse sous le nom de Javel Habibi et précédemment auteur de trois courts métrages sur le milieu drag avec au centre la queen Cookie Kunty.
{"type":"Pave-Haut2-Desktop"}
Un prisme peu coloré
Il y a donc de quoi être surpris, voire de carrément déchanter, lorsque les premières images défilent et que l’on comprend que le film choisit de prendre pour protagoniste, et donc principal point d’ancrage pour le spectateur, Baptiste, un homme hétéro interprété par Pablo Pauly. En couple depuis huit ans avec Samia (Hafsia Herzi), il rencontre un soir Cookie Kunty dont il va tomber amoureux. Si l’on peut totalement concevoir dans ce choix la volonté de toucher un public le plus large possible pour mieux l’immerger dans l’univers du drag, l’éduquer sur la culture queer et de célébrer une fluidité sexuelle et une identité toujours en mouvement (Baptiste sera finalement autant épris de Cookie que de Quentin, le garçon derrière la drag) choisir un personnage hétéro comme personnage principal d’un film queer, c’est sous-estimer la capacité de projection du spectateur. Comme si un hétéro ne pouvait pas se reconnaître et se projeter dans une identité queer et que celui-ci ne pouvait être troublé que par la face féminine d’un garçon (Baptiste brûle de désir pour Cookie avant d’être pris d’une certaine désillusion lorsque, un autre jour, il fait face à Quentin, le garçon derrière la perruque et le maquillage).
Immersion incomplète ?
Si le film décrit avec précision la double facette de la vie d’une drag queen : la scène colorée et festive mais également ces coulisses moins glamours (l’homophobie, les longues séances de maquillages), le film échoue, à force d’être trop sage et éducatif, à retranscrire par de véritables choix de mise en scène toute la force subversive, l’audace politique et l’humour mordant des drags. La tâche n’était pourtant pas impossible. Calibré tout aussi grand public, Drag Race France avait su, pour sa part, saisir cette univers dans toute sa complexité, révélant merveilleusement la joyeuse mais indomptable transgression des queens.
Trois nuits par semaine de Florent Gouëlou au cinéma le 9 novembre
{"type":"Banniere-Basse"}