Le retour des joujoux vivants qui, doués de raison, se faufilent dans la jungle humaine en jouant avec ses clichés. Drôle et subtil. On prend les mêmes et on recommence, pour la joie des petits et des grands. John Lasseter, loin d’être un simple technicien de pointe du dessin animé en 3D, conserve, bien qu’affilié […]
Le retour des joujoux vivants qui, doués de raison, se faufilent dans la jungle humaine en jouant avec ses clichés. Drôle et subtil.
On prend les mêmes et on recommence, pour la joie des petits et des grands. John Lasseter, loin d’être un simple technicien de pointe du dessin animé en 3D, conserve, bien qu’affilié à la maison Disney, une impertinence de bon aloi et un sens de la citation qui permet de le classer dans le camp des potaches persifleurs à la Joe Dante. En plus gentil, certes. D’accord, dans ses grandes lignes, la trame de Toy story 2 n’a strictement aucun intérêt : les aventures boy-scout d’une bande de jouets appartenant à un morveux nommé Andy, qui partent tirer la figurine Woody le cowboy, sorte de cousin de Lucky Luke, des griffes d’un vilain et cupide collectionneur. Mais si l’on s’attache plus en détail à ses innombrables péripéties, Toy story 2 est une mine d’inventions et pas seulement plastiques , de drôlerie, et bien plus. Outre des chapelets de gags subtils, le film égrène les piques parodiques : Rex, réplique du tyrannosaure de Jurassic Park, est une poule mouillée ; la poupée Barbie nunuche qui fait le guide touristique ; Zurg, ridicule croquemitaine de SF, caricature Dark Vador en déclarant à Buzz l’éclair « Je suis ton père ! » ; le Space Ranger, clone macho de Buzz qui se la joue super-héros au comportement stéréotypé est de la trempe des bidasses lobotomisés de Small soldiers et Starship troopers.
On trouve aussi, en filigrane, une intéressante réflexion sur l’art moderne : satire de la collectionnite aiguë et de l’esprit de lucre animant les spéculateurs ; dérision d’une société créativement stérile où tout et n’importe quoi, y compris des produits de consommation courante comme des jouets en plastique, devient muséographiable. En même temps, l’esthétique du film tient du pop-art, notamment les plans dans le magasin de jouets rappelant les multiples de Warhol. La modélisation des êtres humains, leur stylisation, leur expressivité figée nous replongent dans l’hyperréalisme des années 70.
Par ailleurs, ces jouets sont des cousins de l’homme rétréci de Jack Arnold, pour qui une banale excursion urbaine devient une aventure dantesque, qu’ils surmontent avec un sens ludique et subversif. Par exemple, la périlleuse traversée d’une route fréquentée où ils provoquent des accidents en avançant cachés sous des cônes de signalisation. En détournant le système fonctionnel de la société humaine pour arriver à leurs fins, ces artefacts industriels préfigurent un temps où, telle la créature de Frankenstein, ils seront les bourreaux de leurs inventeurs. Tremblez ! En attendant, voilà un dessin animé moderne qui renvoie aux oubliettes toutes les sucreries romanesques, gluantes de moralisme.
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