Sur un sujet original, une réflexion sur le fossé culturel et social entre les pays riches et les pays pauvres.
C’est le premier film de long-métrage de Guillaume Bonnier, qui est un premier assistant réalisateur reconnu – il a notamment travaillé avec Xavier Beauvois, Bruno Podalydès, etc. Pourtant, cette histoire de voilier en mer Rouge a peu à voir avec Liberté-Oléron de Podalydès.
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L’action se déroule de nos jours. Jean (Pierre Lottin), Isabelle (Daphné Patakia, dans un rôle plutôt sombre) et son jeune fils Damien, sont partis pour faire le tour du monde sur le voilier de Jean.
À Djibouti, à la suite d’une panne de moteur, ils font la connaissance de celui qui se fait appeler Mike (Abdirisak Mohamed), un chauffeur de taxi d’origine somalienne qui leur rend service. Jean a un peu peur du golfe d’Aden, où sévissent des pirates, où la mer est plus dangereuse aussi. Quand Mike propose de les accompagner, Jean accepte alors qu’Isabelle, méfiante, n’est pas d’accord. Après tout, que savent-ils vraiment de Mike ? Un voyage en voilier, c’est un huis clos au milieu de l’immense. Mais les voici partis. Rien ne va se dérouler comme prévu. Cette croisière va révéler le visage de chacun, sa vraie personnalité.
Les rôles tanguent
Le film de Guillaume Bonnier est un tableau contemporain. Il va faire rejaillir quelques vérités sur le monde actuel : faire le tour du monde en voilier est une activité de blancs aisés, même si Isabelle, sans prendre conscience de la différence sociale entre Mike et elle, se plaint auprès de lui de la France, où elle survivait du chômage. Quel sens cela a-t-il pour un Somalien qui végète dans un autre pays que le sien et pour qui la France est malgré tout un pays riche ? Isabelle ne comprend pas non plus d’elle-même, que faire du seins nus sur le bateau choque Mike. Mais que devrait-elle faire ? Vivre comme elle l’entend, comme en Occident, comme une femme libre, ou se soumettre aux règles de comportement de la région où elle se trouve, que cela lui plaise ou non ? À qui appartient la mer ?
Le conflit culturel et social ne fait que se creuser entre les trois voyageurs. Après que le bateau est attaqué par une petite bande de pirates, Jean (admirablement interprété par Lottin, acteur de composition remarquable, absolument méconnaissable une fois encore, dans un rôle très éloigné de ceux qu’il joue dans la saga des Tuche – où il joue le rôle du grand frère idiot et gay, Wilfried – ou dans La Nuit du 12 de Dominik Moll – où il incarnait un homme violent) paraît de plus en plus faible, Isabelle plus forte et dure, libre, Mike plus inquiétant, voire menaçant.
Loin de tout célébration romantique des attraits et de la magie de la mer, ce premier film un petit peu bancal (mais la stabilité n’est pas une vertu marine), soulève ou brasse, tout en restant dans l’action, toute une série de contradictions de notre monde et de notre humanité.
Tout le monde m’appelle Mike de Guillaume Bonnier, avec Pierre Lottin, Daphné Patakia, et Abdirisak Mohamed. En salle le 5 juillet 2023.
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