Dispositif, mon beau souci. D’abord un doigt de split-screen chez Strindberg (son adaptation de Mademoiselle Julie, l’an passé), avant de puiser à pleines brassées dans les options offertes par le digital : Mike Figgis s’engage à épuiser la durée (93 minutes) d’une cassette DV en filmant son récit en une seule prise continue – selon […]
Dispositif, mon beau souci. D’abord un doigt de split-screen chez Strindberg (son adaptation de Mademoiselle Julie, l’an passé), avant de puiser à pleines brassées dans les options offertes par le digital : Mike Figgis s’engage à épuiser la durée (93 minutes) d’une cassette DV en filmant son récit en une seule prise continue – selon un principe déjà initié il y 10 ans par Philippe Grandrieux avec la série documentaire Live. Mais Time code ne s’arrête pas au seul enregistrement en temps réel et démultiplie son pari. Sur quatre fenêtres-écrans de taille égale s’organisent simultanément autant d’histoires qui, démarrant en des endroits différents mais réglées sur la même horloge interne, vont rapidement s’entrecroiser. Au-delà de la pure performance, Time code revêt suffisamment d’atours ludiques pour que ce pliage en quatre de la diégèse ne s’abîme pas dans l’indigeste. Ne pouvant englober d’un seul tenant l’intégralité morcelée de l’action, regard et ouïe du spectateur sont soumis à un incessant balayage. A chacun alors d’élaborer, à partir d’un vagabondage rétinien autour des quatre plans-séquences, son propre montage. Afin de complexifier davantage cette mécanique, Figgis sème ici et là d’autres vignettes audiovisuelles : moniteurs vidéos, écran de projection, « mouchard »? Superposition des couches, porosité, enchevêtrement des récits, interactivité, mise en abyme, Time code pourrait facilement s’asphyxier sous la glose interprétative et se muer en un prétentieux objet nombriliste. Malin, Figgis fait intervenir une vidéaste arty qui formule, à l’aide de références amphigouriques à Gropius, Borges ou Debord, le projet qu’elle entend mener et qui n’est ni plus ni moins que le film auquel on assiste. Le fou rire du producteur qui vient sanctionner cet exposé dédouane Time code de toute suffisance pour le ramener sur un terrain nettement plus trivial : une sitcom chorale aux accents de thriller, une chronique qui prend un certain plaisir à égratigner les us, coutumes et travers de son landerneau. Et si expérimentation il y a, Figgis s’y attelle avec l’aisance d’un gamin doué dans le maniement du Rubik s cube.
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