Un bel hommage à l’äge d’or du film de gunfights honk-kongais, avec de sidérants combats chorégraphiés.
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Mais d’où sort ce truc ?”, est, à coup sûr, la première question que va se poser le spectateur à l’issue de The Raid, troisième film – mais premier à nous parvenir – d’un jeune réalisateur gallois (!) exilé en Indonésie, Gareth Evans.
Depuis que le cinéma hong-kongais a rendu les armes, ou du moins les a rengainées pour ne les sortir qu’aux grandes occasions (un Johnnie To ou un Tsui Hark de temps en temps), et depuis que John McTiernan a arrêté le cinéma, chaque nouveau film d’action/arts martiaux est guetté comme le messie par les spectateurs orphelins de fluides chorégraphies, de tendres gunfights et de suaves étreintes à l’arme blanche.
Si The Raid, disons-le sans tarder, n’égale pas ses modèles, il en constitue néanmoins la plus stimulante reformulation depuis longtemps.
Tout entier dévolu à ses principes de linéarité (on y avance par niveau, comme dans un vieux jeu vidéo) et d’exténuation (des corps, de l’espace, de l’œil), The Raid expose ses enjeux en quelques scènes brèves : à Jakarta, un commando de flics d’élite prend d’assaut un immeuble délabré, dans le but d’arrêter le baron de la pègre qui s’y cache, au dernier étage ; à mi-chemin, l’alerte est donnée et les chasseurs deviennent soudain les proies. Fight !
Scénario élémentaire, qui s’agrémente bientôt d’une intrigue familiale (une lutte fratricide) et de développements politico-pouet-pouet (certains flics sont corrompus, surprise !), pour donner un peu d’épaisseur aux personnages.
En vain : ce n’est pas pour leur caractérisation psychologique qu’on s’intéresse à eux, mais uniquement pour ce que peuvent leurs corps. Et en l’occurrence, ils peuvent beaucoup.
Celui d’un personnage en particulier, surnommé Mad Dog (“chien fou”), l’un des plus beaux méchants du cinéma d’arts martiaux, qui combat pour le plaisir, sans calcul, donnant un visage radieux aux pouilleux sans verbe du bidonville.
Sa sauvagerie est telle qu’elle finit, miraculeusement, par émouvoir. Et c’est justement toute la beauté de The Raid qui s’y incarne : celle qui consiste à foncer dans l’action tête baissée, sans cynisme ni veulerie, pour la simple beauté du geste.
Gareth Evans ne fait pas seulement preuve de talent chorégraphique, il se révèle aussi un excellent topographe : le bidonville, décor unique, apparaît, dès le premier plan d’ensemble, comme un Léviathan dont il va falloir scruter et expurger les intestins (ce que Ridley Scott n’a pas pu, ou pas su faire avec la grotte de Prometheus).
Ainsi, la mise en scène d’Evans, à défaut d’être aussi gracieuse que celles de John Woo ou de Johnnie To, est viscérale. Elle vise à épuiser l’espace,
à utiliser chaque centimètre carré du décor – dont on sent qu’une bonne partie du minuscule budget y a été dépensée –, ce qu’illustre parfaitement la scène du faux mur transpercé goulûment par un sabre…
S’il est trop tôt pour faire d’Evans un maître du cinéma d’action – il lui manque une vision du monde, une métaphysique propre –, The Raid est une merveille de précision et de sécheresse, un classique instantané, dont la suite annoncée, espérons-le, ne noiera pas ce talent naissant sous les dollars.
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