Maggie Gyllenhaal ne démérite pas pour ses débuts à la réalisation et offre un film réussi.
Il est un signe qui ne trompe pas pour préjuger des débuts d’un acteur ou d’une actrice derrière la caméra : en règle générale, s’il ou elle n’en a pas profité pour s’octroyer un rôle, c’est que le film a des motivations plus nobles qu’une simple opération de reboost artificiel de carrière, et qu’il a donc de meilleures chances d’être réussi.
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L’axiome a valu pour Paul Newman en son temps (De l’influence des rayons gamma sur le comportement des marguerites) ou plus récemment pour Félix Moati (Deux fils) ; c’est au tour de Maggie Gyllenhaal d’en faire à nouveau la démonstration.
Du fantasme à la réalité
L’actrice, qui a justement franchi un certain cran de maturité ces dernières années (The Deuce), signe un film assez tortueux sur la maternité, centré sur une universitaire quadra, borderline mémère, en vacances sur une île grecque (rôle taillé pour l’entre-deux-âges vibrant d’Olivia Colman).
Adaptant un roman d’Elena Ferrante, Gyllenhaal noue le récit à une double confrontation du personnage principal ; envers son passé, pas la meilleure partie (des scènes assez chichiteuses et mystifiées sur sa rencontre amoureuse et sa vingtaine intello-baba), et de manière bien plus réussie envers une population locale non prévue dans son fantasme de villégiature artistique méditerranéenne : une débordante “famille” habituée des lieux, composée de patriarches bedonnants, de petits malfrats et de cagoles surmaquillées, avec option marmaille bruyante et micro-agressions plus ou moins assumées.
Film de vacances ratées
Tandis que son rêve de Leonard Cohen à Hydra s’évapore dans les vapeurs de mauvais shit et les rugissements de moteurs de zodiac, Leda projette sur ce voisinage grouillant sa propre intériorité, jetant son dévolu sur une jeune mère qu’elle perçoit comme fragile et sur laquelle elle s’entiche de veiller, sans vraiment l’en avoir ne serait-ce que prévenue.
Si le film a reçu à Venise un prix du scénario (au sein d’un palmarès notoirement féminin avec L’Événement d’Audrey Diwan et Le Pouvoir du chien de Jane Campion), c’est plutôt dans la mise en scène et la direction d’acteurs que Gyllenhaal montre son talent, articulant son film autour de situations de déséquilibre, de petites conflictualités vacancières, de coexistences physiques, de choses grouillantes et vivantes : des bandes d’ados turbulents, des vieux locaux libidineux, des mômes en pleurs et des femmes qui ne veulent pas se voir vieillir – que de choses qui ne peuvent se filmer autrement qu’en écoutant leur respiration propre, ce que la réalisatrice parvient indéniablement à faire. Le thriller psychologique est plus bringuebalant, mais le film de vacances ratées est, lui, bien réussi.
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