Atavisme oblige, on dit toujours beaucoup de mal des Anglais, y compris dans cet organe britophile. Artistes médiocres, ils n’auraient engendré en gros qu’une seule forme d’art au xxème siècle, une sous-culture nommée pop art et musique. Quand on parle de films anglais, on s’aligne sur la Nouvelle Vague qui ne pouvait pas les […]
Atavisme oblige, on dit toujours beaucoup de mal des Anglais, y compris dans cet organe britophile. Artistes médiocres, ils n’auraient engendré en gros qu’une seule forme d’art au xxème siècle, une sous-culture nommée pop art et musique. Quand on parle de films anglais, on s’aligne sur la Nouvelle Vague qui ne pouvait pas les piffer. On oublie que la Grande-Bretagne est une vraie nation cinématographique, qui éclipse l’Espagne, la Suisse et le Benelux réunis. On oublie que le cinéma britannique est un des rares à être resté proche de ses racines populaires. Evidemment, ça n’est pas toujours du meilleur goût. Exemple : The Full Monty, petite comédie sur six chômeurs de Sheffield, las de leur marasme insondable, qui décident de se faire du fric en montant un show de strip-tease masculin, type Chippendales. Rien de transcendant. On pourrait taxer ça de pochade grossière, et puis on passerait à autre chose ; à la politique, aux droits de l’homme, blablabla… C’est d’ailleurs ce que fait Eric Rochant avec Vive la République ! (sortie le 9 novembre), qui présente un point de départ similaire : des chômeurs s’associent pour sortir de leur déprime. Mais eux s’assignent une tâche responsable : fonder un parti politique ! De la science-fiction par rapport au film de Cattaneo, qui ne sort jamais de la réalité la plus prosaïque avec son affaire de Chippendales. Non seulement le film est profondément ancré socialement et géographiquement, mais chaque péripétie, chaque gag, est une conséquence du délitement du tissu industriel britannique. Ainsi, une des premières scènes comiques tourne autour du vol de poutrelles métalliques dans une usine désaffectée. Une autre saynète traduit la déchéance que représente pour un ex-sidérurgiste de faire le vigile de supermarché… D’accord, le scénario et la psychologie des personnages ne brillent pas par leur subtilité et le film est tout au plus un pastiche bringuebalant du propret The Commitments d’Alan Parker - pastiche vulgaire aussi, puisqu’il y est question de strip-tease. Mais justement, il y a de l’audace dans cette exhibition de corps masculins, gros, vieux, maigrichons, insulte aux boys’ bands. Et puis les personnages sont vrais avec leur médiocrité, leur désespoir fanfaron. Cette vision terre-à-terre d’un prolétariat laissé-pour-compte est très convaincante. Seuls les Anglais savent mettre en scène des prolos. C’est déjà beaucoup.
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