Tilda Swinton dédoublée dans le nouveau Joanna Hogg, Keanu Reeves dans une ataraxie sanglante et un premier film colombien impressionnant… Découvrez sans attendre les films de la semaine.
The Eternal Daughter de Joanna Hogg
Que nous montre la cinéaste, alors ? Un lieu gothique, sorte de cliché d’ambiance britannique. Elle en tire d’abord un genre de satire sociale sur le mépris de classe et l’exigence d’excellence de deux femmes, même progressistes (pour la plus jeune), issues de l’aristocratie, et sur ces lieux anciens devenus des hôtels de luxe qui semblent toujours vides de client·es, habités par quelques employé·es peu intéressé·es par leur métier et une poignée de “fidèles” domestiques abandonné·es dont ne sait pas très bien si elles et ils existent ou pas tant celles et ceux-ci semblent sorti·es d’un épisode de Downton Abbey. On pense à Shining…
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Lire la critique de Jean-Baptiste Morain
John Wick 4 de Chad Stahelski
Ce qui accroche dans John Wick, ce n’est pas l’action en tant que telle, mais l’effet paradoxal de stase qu’elle produit, l’espèce d’apothéose zen dans la violence. Comme un déluge étrangement anesthésiant de sbires anonymes se précipitant sans protestation ni peur vers leur mort certaine dans les bras d’un héros apathique, hagard – douce faucheuse mélancolique que seul pouvait bien sûr incarner Keanu Reeves.
Lire la critique de Théo Ribeton
L’Éden d’Andrés Ramírez Pulido
Ramírez Pulido a inventé un décor (une hacienda délabrée aux airs de plateau de shooting ruin porn) qui n’a rien d’une prison mais parvient à nous faire croire qu’elle en est une, sans murs ni barreaux sinon la forêt et la torpeur. Dans ce lieu abstrait et paradoxal, son portrait de jeunesse a quelque chose lui aussi d’assez rêvé, voire symbolique : plus qu’une peine à purger, c’est tout un rapport enfoui à leur propre violence auquel sont ici venus se confronter ces jeunes garçons dont certains ne sont pas loin d’avoir littéralement “tué le père”.
Lire la critique de Théo Ribeton
Le Bleu du caftan de Maryam Touzani
La métaphore est facile, mais elle est inévitable, tant elle semble être au cœur même, le point le plus élevé de la cohérence et de la fabrication du film, de son tissu narratif en forme de conte contemporain : son récit, tel un caftan, est un travail d’artisan de haute valeur, qui tisse plusieurs intrigues ensemble, rehaussées par une image aux couleurs chaudes, pour aboutir à une conclusion qui unit de manière inextricable tous ses fils (amoureux, sexuel, politiques), pour nous offrir à nous et à Mina le plus beau des vêtements.
Lire la critique de Jean-Baptiste Morain
Atlantic Bar de Fanny Molins
Fanny Molins filme avec une patience inestimable les pulsations du lieu, aussi bien terre d’exil que de retrouvailles, animé par une temporalité qui lui est propre, insoumis à la vitesse de la ville, érigé en petit théâtre d’un romanesque sans fin et poétique. Filmé en huis clos, le documentaire déploie une incroyable intensité grâce à une mosaïque de personnages extrêmement denses et charismatiques que la fiction n’aurait pas pu inventer.
Lire la critique de Ludovic Béot
De grandes espérances de Sylvain Desclous
Il ne faut pas se fier aux toutes premières scènes du film, un peu trop guindées, corsetées, scolaires, comme si le réalisateur et son co-scénariste, Pierre Erwan Guillaume, voulant déballer d’emblée leur programme, s’étaient laissés aspirer par le logiciel de leurs agaçants prétendants. Mais peu à peu, surtout à partir de l’accident qui va les hanter jusqu’au bout, le film trouve son ton. Il s’accorde, au fond, à mesure que ses deux personnages se désaccordent.
Lire la critique de Jacky Goldberg
Dalva d’Emmanuelle Nicot
De cette matière potentiellement sensationnaliste, la réalisatrice Emmanuelle Nicot choisit au contraire la sobriété et la pudeur d’un récit qui laisse hors champ le crime en question pour mieux raconter les effets dévastateurs sur le présent. Sans paternalisme ni victimisation, la caméra se place du point de vue de l’enfant, pour explorer sa signification de l’amour, de la famille et de l’abus. “Je ne suis pas une fille, je suis une femme”, répète la jeune Dalva (impressionnante Zelda Samson qui incarne avec beaucoup de contraste la maladresse et la désorientation) pendant toute la première partie du film, incapable de comprendre les abus qu’elle a subis, car elle a normalisé cette relation.
Lire la critique de Ludovic Béot
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