Beau et sobre mélo poétique du vétéran du cinéma polonais, malgré des mises en abyme inutiles.
Naviguant toujours entre académisme et progressisme, Andrzej Wajda, qui depuis plus de cinquante ans n’a cessé d’accompagner et de commenter dans ses films l’histoire mouvementée de son pays, et a longtemps été la figure de proue du cinéma polonais, revient avec une œuvre plus intimiste qu’à l’accoutumée.
{"type":"Pave-Haut2-Desktop"}
Pour l’occasion, il a refait appel à la comédienne Krystyna Janda, égérie de sa grande époque. Ces retrouvailles semblent quasiment avoir fourni au réalisateur le sujet du film, car elles affleurent constamment, en filigrane. En fait, Tatarak mêle trois registres très distincts.
D’abord l’adaptation d’une nouvelle très simple de Jaroslaw Iwaszkiewicz sur la relation troublante d’une femme d’âge mûr avec un jeune homme qui lui rappelle ses fils disparus (à quoi Wajda a intégré une histoire de maladie tirée d’un récit de Sándor Márai).
Ensuite, il y a quelques (fausses) scènes du tournage avec Wajda lui-même.
Et enfin, un monologue écrit et dit par Krystyna Janda sur les derniers instants de la vie de son mari, le chef opérateur Edward Klosinski, artisan des plus célèbres films de Wajda. Remémoration un brin solennelle, dans un décor presque vide.
Quant aux bribes du tournage, franchement facultatives, elles ont pour unique intérêt ce bref moment où Krystyna s’enfuit soudain, après une scène filmée dans l’eau, et se fait prendre en stop sur la route par un automobiliste.
Le seul segment qui vaut le détour, le plus important, dont Wajda aurait pu tirer un superbe moyen métrage, est la fiction romanesque, impeccablement sobre et belle, où l’épouse un peu perturbée d’un médecin rencontre et séduit un homme d’une vingtaine d’années.
Dans cette partie poétique, la nature devient le catalyseur de cette relation impossible. D’où le titre, Tatarak, qui se réfère aux joncs bordant la rivière où le semblant d’idylle se noue et se dénoue sur un mode tragique.
Il y a quelque chose d’impressionniste, de renoirien au double sens (se référant à Jean comme à Auguste), dans cette “partie de campagne” où les personnages et leur amour non dit sont indissociables de cet environnement flou et exubérant.
La sensualité et l’élément aquatique, le sentiment et la végétation proliférante forment un continuum parfait. On regrette seulement que le cinéaste n’ait pas su se contenter de ce mélodrame en sourdine et en demi-teintes, dont la pureté rappelle celle de certains grands films tardifs.
{"type":"Banniere-Basse"}