Nous sommes bien contents de l’oscar décroché par Marion Cotillard. Pas que nous soyons très fans de La Môme et du cinéma d’Olivier Dahan, mais nous aimons bien Cotillard – bonne actrice dont nous espérons qu’elle obtiendra un jour un premier rôle dans un grand film. Nous sommes contents, mais de là à ce que […]
Nous sommes bien contents de l’oscar décroché par Marion Cotillard. Pas que nous soyons très fans de La Môme et du cinéma d’Olivier Dahan, mais nous aimons bien Cotillard – bonne actrice dont nous espérons qu’elle obtiendra un jour un premier rôle dans un grand film. Nous sommes contents, mais de là à ce que le 20 heures de France 2 mette cette nouvelle secondaire en ouverture de son édition du 25 février, avant la flambée des prix alimentaires, l’actu internationale ou les dernières conneries du président Saint-Nicolas-du-Chardonnet !… Après les cotillons Cotillard, nous saurions presque gré à Françoise Laborde d’avoir signalé du bout du prompteur que les Coen et Daniel Day-Lewis avaient aussi remporté quelques récompenses sans doute secondaires. Le chauvinisme muséal teinté d’une pointe d’anti-américanisme est une valeur sûre de notre beau pays. Car si les oscars faisaient la une du 20 heures alors qu’ils sont habituellement relégués en fin de journal, c’est bien parce qu’une actrice française, incarnant un film patrimonial français, avait gagné en territoire américain – chez ce grand cousin dominateur dont on jalouse l’aura et que l’on aime tant détester. En un temps où la France balance entre la déprime et la honte, les responsables de France 2 ont jugé que Super Marion offrait tout d’un coup un joli miroir à notre narcissisme national en berne. D’une miette d’actualité, ils ont fait un festin. Faut-il pour autant se réjouir que l’image de la France aux Etats-Unis soit encore figée dans les clichés passéistes, que notre culture populaire musicale soit là-bas réduite à la môme Piaf ? L’Académie des oscars aurait-elle couronné un biopic français consacré à Barbara, Gainsbourg ou Daft Punk ?
En primant Marion Cotillard et Daniel Day-Lewis, elle a en tout cas affirmé une conception du jeu d’acteur privilégiant les signes extérieurs les plus voyants : extraversion, grimaces, maquillage et gestuelle outrés. Plutôt que le magnétisme nu d’une présence, le goût de l’imitation, du cabotinage. Cette conception s’est d’ailleurs retrouvée aux César, avec les prix de Marion Grand Chelem et de Mathieu Amalric. Amalric est un acteur extraordinaire, et plusieurs films en 2007 permettaient de distinguer son talent (La Question humaine de Nicolas Klotz). Mais on a choisi, avec Le Scaphandre et le Papillon, son travail le plus étrange et original en surface (toujours la signalétique extérieure), le plus gênant à mes yeux, au sens où il m’est souvent malaisant qu’un acteur “joue” un alcoolique, un junkie, un fou ou un handicapé. Forcément réduit au silence dans le film de Schnabel, Amalric fut aussi en partie privé de sa parole pendant la cérémonie télévisée, Canal+ se permettant de trancher dans la part la plus politique de son discours sous prétexte qu’elle était redondante avec l’intervention de Jeanne Moreau. Peut-être aurait-il dû prolonger sa performance dans la vraie vie et délivrer son message en battant de la paupière ?
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