En dehors d’Hollywood et du circuit indé officialisé par Sundance, le cinéma américain est d’une richesse inépuisable et largement insoupçonnée du spectateur européen. L’année dernière, la Cinémathèque avait montré un petit programme concocté par l’universitaire cinéphile Richard Peña assemblant une petite dizaine de films échappant à tous les radars de distribution. Stupid Things semble venir […]
Le quotidien d’un jeune ado noir paumé qui cherche à intégrer un gang. Du cinéma indé US, loin des blockbusters et de Sundance.
En dehors d’Hollywood et du circuit indé officialisé par Sundance, le cinéma américain est d’une richesse inépuisable et largement insoupçonnée du spectateur européen. L’année dernière, la Cinémathèque avait montré un petit programme concocté par l’universitaire cinéphile Richard Peña assemblant une petite dizaine de films échappant à tous les radars de distribution.
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Stupid Things semble venir aussi de ces zones les plus reculées et sauvages du ciné US mais a eu le bonheur de séduire l’excellent distributeur Jokers. Le film d’Amman Abbasi s’attache à Dayveon, 13 ans, ado comme les autres (visage angélique, chevauchant son vélo…), à ceci près qu’il est noir, pauvre, issu d’une famille décimée (parents peu présents, grand frère admiré mais tué dans un règlement de comptes).
Abbasi s’intéresse à l’épaisseur du quotidien
Pour tromper son ennui et sa solitude, Daeyvon essaie de se faire enrôler dans le gang local. Amman Abbasi adopte un naturalisme de bon aloi clairement enraciné dans son territoire, l’Arkansas rural, rappelant David Gordon Green, les premiers Harmony Korine, ou encore Jeff Nichols. Loin de se contenter de l’aspect extérieur du gang et de tous les clichés qui sont associés à ce genre d’images (attitudes et gestuelles de coqs, parler argotique, codes tribaux…), Abbasi s’intéresse à l’épaisseur du quotidien qui amène ces jeunes vers ce type d’existence : pauvreté, chômage, manque de repères familiaux, territoire isolé, quasi insulaire…
Au milieu de ce monde à la fois rassurant et dangereux évolue Dayveon, gamin encore plein de la tendresse de l’enfance mais attiré par les plus grands et un désir d’appartenance. La sortie de l’enfance est certes un sujet rebattu, mais Abbasi transfigure cette banalité par son ancrage puissant dans la ruralité américaine, son recours à des comédiens amateurs et le tempo patient et attentif de son filmage qui semble s’accorder à la langueur poisseuse du Sud.
Stupid Things rappelle que derrière les blockbusters, les superhéros, les superstars, les superbudgets et le superprofessionnalisme, le cinéma américain bouge encore et filme avec fraîcheur, fragilité et sensibilité les habitants oubliés de ce pays.
Stupid Things d’Amman Abbasi (E.-U., 2017, 1 h 15)
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