Beauté moderne et mafia impitoyable s’entremêlent dans ce thriller de Charles de Meaux.
Après l’aventureux Shimkent Hotel, tourné à l’arrache en Asie centrale, Charles de Meaux poursuit dans Stretch le thème du Français exilé très loin de chez lui et pousse son tropisme asiatique jusqu’à Macao (qui est, on le sait depuis Joseph von Sternberg, le “paradis des mauvais garçons”).
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Jockey pincé pour une affaire de dopage, Christophe (Nicolas Cazalé, au physique idoine d’innocent) est obligé d’aller exercer dans la ville-casino d’Extrême-Orient. Il y gagne des courses, de l’argent, rencontre peut-être l’amour (superbe Fan Bingbing) mais aussi les fameux “mauvais garçons”, un réseau mafieux impitoyable qui truque les courses pour empocher des paris juteux.
La beauté moderne de Macao, ville high-tech, filmée en superbe numérique HD (avec incrustations de SMS), contraste avec la noire violence régissant l’univers de Christophe. Sous les feux illusoires de la cité-néon, la bestialité du crime organisé. Carradine fait une apparition anecdotique mais sa mort réelle, survenue en fin de tournage, est intelligemment insérée dans le film par le biais d’un flash info à la radio.
Sur un scénario croisant Nous avons gagné ce soir et Lost in Translation, de Meaux vise la très chic mélancolie des grands esthètes asiatiques du cinéma contemporain tels que Hou Hsiao-hsien ou Wong Kar-wai, pour ne citer que les plus célèbres.
Pari louable de par son ambition, Stretch n’est pas sans problèmes. On regrette par exemple que le réalisateur ne tire pas plus parti de son ancrage rare dans le milieu des jockeys en filmant plus longuement les courses et les chevaux (un travelling latéral sur un cheval au galop est l’un des plus beaux plans de cinéma possibles aux yeux de votre serviteur éternellement tatoué par Ford et Walsh).
A force de (fatale) beauté froide, Stretch souffre aussi d’un déficit d’incarnation. De Meaux rencontre finalement le même type de problème qu’Hustache-Mathieu avec Poupoupidou (lire p. 76) : le culot de défranciser le cinéma français, de se frotter à des référents élevés, mais le risque de ne pas passer la barre, de souffrir de la comparaison avec les modèles élus en n’en saisissant que l’écume.
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