Remake d’un film de fantômes asiatique où les zones d’ombre, de flou et d’abstraction ont été réduites. Moyennement excitant.
Un remake américain d’un film d’horreur thaïlandais (Shutter), réalisé par un cinéaste japonais et coproduit par la compagnie Vertigo, spécialisée depuis quelques années dans le remake du film de genre asiatique. Donc un fantastique métissé, mi-occidental, mi-oriental, qui peut servir d’initiation modérée à ceux qui ne connaîtraient pas ce qu’on appelle la J-Horror (J pour Japan). D’ailleurs, l’histoire alterne justement entre le Japon et les Etats-Unis, et les personnages sont américains et nippons. Le sujet est possible – le fantôme d’une femme suicidée se manifeste sur des photographies –, mais pas foncièrement nouveau. C’est une remise au goût du jour du spiritisme qui fut le grand jeu de société à la mode à la fin du XIXe siècle. Quand on aura fait le tour de tous les outils de communication et d’enregistrement pour faire surgir les revenants, on pourra passer à autre chose…
Plus concrètement, le film brode autour du cas d’un photographe jeune marié poursuivi par le fantôme d’une Nippone défunte à laquelle il fit jadis subir divers sévices. Le décor, à la fois sinistre et moderne, dans la veine des films d’Hideo Nakata, est très convaincant. D’ailleurs, la réalisation d’Ochiai n’est pas inintéressante. On dit du bien de ses précédentes réalisations (inédites en France), Hypnosis et Infection. Le problème c’est qu’en travaillant aux Etats-Unis, le cinéaste nippon a dû composer avec un scénario qui a le tort de trivialiser l’onirique, notamment par le biais de flash-backs trop explicatifs. Le procédé peut être intéressant dans une série entropique comme Lost, où chaque information sur le passé ou le futur contribue à complexifier l’intrigue. Mais ici c’est très terre à terre. Les personnages américains étant affreusement lisses, ils seraient à la rigueur plausibles en figures de série B, catégorie dans laquelle on pourrait ranger le film pour excuser certaines de ses facilités. Mais économiquement, ça n’est pas plausible. Spirits, film de fantômes basique pour grands débutants, a été tourné et distribué avec plus de moyens que le moindre Kiyoshi Kurosawa.
Ce genre de films correspond à une demande implicite du grand public, avide de signes, de codes, bref de repères familiers que le seul cinéma US peut lui fournir. D’où cette flopée de remakes de films asiatiques (le filon n’est pas prêt de se tarir), qui souvent affadissent le matériau d’origine. Mais on peut comprendre que certains désirent frissonner tout en étant rassurés sur la nature de ce qui les angoisse.