Adultère et stratagèmes sur fond de vie d’entreprise. Enigmatique et glaçant.
Christoph Hochhaüsler (Le Bois lacté, L’Imposteur) est l’un des tenants de la nouvelle vague du cinéma allemand (ou “école de Berlin). Inspiré par les amours bibliques de David et Bethsabée transposées à notre époque dans un autre royaume (celui de l’argent roi), son troisième film raconte l’histoire d’une passion.
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Celle de Svenja, l’épouse oisive d’Oliver, jeune cadre dynamique dans une grande banque d’affaires de Francfort, avec le grand patron manipulateur d’Oliver, Roland Cordes.
Pour se débarrasser du mari de sa maîtresse, Cordes va utiliser la ruse pour convaincre ses associés qu’il faut, malgré sa jeunesse et son expérience, l’envoyer en mission en Indonésie, sans lui préciser évidemment que son prédécesseur vient d’y être assassiné…
Sous toi, la ville fait partie des films qu’on ne sait pas trop par quel bout prendre. Et si l’on se saisissait de son talon d’Achille, celui qui a servi à le tremper dans la forme artistique pour le protéger – de quoi ?
Admettons donc ceci (pour bientôt le réfuter) : le point faible apparent du film est la trop grand visibilité de ses intentions. Un décor ultramoderne et glacé, une ville froide, de grandes vitres, des couloirs sans fin, le monde froid comme un serpent de la finance avec ses ruses et ses manipulations, des scènes de sexe tout sauf érotiques (en réalité rares – mais leur rareté suffit à suggérer leur intensité), des personnages figés et presque inexpressifs, la violence à voix basse, le monde du travail et ses moquettes épaisses qui étouffent les éclats de voix, etc.
A ce paysage ultra codé et symboliste (un expressionnisme moderne), tranchant comme l’acier ou le verre, Hochhaüsler appose la malignité, la perversité (Cordes ment, triche, s’adonne à des activités bizarres), comme pour dénoncer l’ignominie des puissants, d’un monde du travail sans pitié, enrôlé de force dans une guerre mondiale ouatée et virtuelle (dans la Bible, le mari de Bethsabée meurt dans une bataille).
Or malgré tout, la détermination aveuglante de la mise en scène nous ouvre peu à peu sur un mystère, celui qui unit deux êtres qui n’ont rien à faire l’un avec l’autre et qui pourtant le sont.
Alors la forme du film emporte comme un fleuve en furie toutes nos préventions, toutes les propres intentions de son auteur, et les fusionne. Et la fin du film, énigmatique et fantastique, sonne comme un glas : la rédemption des forts se fera malgré eux, sans eux.
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