Nike ta mère. Beau documentaire sur le basket des rues qui marie gestuelle technique, suspens sportif et impact social. Sortie Dans un contexte estival décuplé cette année pour raisons footballistiques, quand les distributeurs vident leurs poubelles sur les écrans de France, Soul in the hole n’a aucun mal à planer au-dessus du panier et à […]
Nike ta mère. Beau documentaire sur le basket des rues qui marie gestuelle technique, suspens sportif et impact social.
Sortie Dans un contexte estival décuplé cette année pour raisons footballistiques, quand les distributeurs vident leurs poubelles sur les écrans de France, Soul in the hole n’a aucun mal à planer au-dessus du panier et à dunker la pitoyable concurrence. L’action du film se situe pendant l’été new-yorkais et nous emmène au coeur du tournoi annuel de basket inter-quartiers durant lequel s’affrontent les meilleures équipes des ghettos noirs sur l’asphalte brûlant du Bronx et de Brooklyn. La réalisatrice Danielle Gardner a particulièrement suivi les Kenny’s Kings, formation « managée » par le replet Kenny, épicier de son état, au sein de laquelle brille un certain Bogger, vedette montante du basket des rues.
Première grosse qualité du film, son immersion documentaire : Gardner a passé des mois entiers dans l’environnement des Kenny’s Kings, d’où la sensation brute de décoffrage de son filmage. On ressent quasi physiquement l’affrontement des matchs, les efforts des corps, l’euphorie ou la colère des supporters, pendant que grillent les hamburgers et pulsent les ghetto-blasters. Dimension physique décuplée quand les équipes et leurs fans épousent les mêmes lignes de fracture que des quartiers ou des gangs rivaux.
Autre force du film, la qualité du spectacle sportif qu’il propose, jolie alternative au Mondial. Certains gestes sont dignes du basket pro et le jeune Bogger a vraiment l’étoffe d’un futur membre de la NBA. Quant à la cinéaste, elle a su tendre en fil rouge un vrai suspens sportif (qui va gagner le match du jour ? les Kenny’s Kings vont-ils aller jusqu’en finale ? etc.). S’il n’était que ça, Soul in the hole serait déjà un bon petit documentaire sur le sport de base.
Mais en Amérique, le basket charrie derrière lui toute une batterie de casseroles sociales, politiques et idéologiques. Plutôt que de nous assener tout un discours pédagogo-surplombant façon Envoyé spécial, Gardner a l’intelligence de laisser les images parler d’elles-mêmes et de faire fictionner son docu, notamment à travers la relation entre le manager de l’équipe et son joueur vedette. Kenny a cueilli Bogger dans la rue et en a fait son fils adoptif. Ce Guy Roux du ghetto a deux rêves : gagner la satanée coupe des quartiers, mais surtout aiguiller son poulain vers un avenir NBA et le détourner définitivement de son destin de dealer de dope. Kenny et Bogger deviennent ainsi de vrais personnages de mélo, héros d’autant plus émouvants que cette histoire est vraie et qu’elle ne se finit pas forcément dans un coucher de soleil en Technicolor.
Soul in the hole reste ainsi plus proche d’un roman de Goines que de Rocky. C’est un film brut et modeste, il a de la soul et du jive, il rend le manichéisme et les mignardises stylistiques d’un Spike Lee bien dérisoires : c’est l’anti-planète Jordan, une tache de réel bien grasse dans le monde immaculé de Nike.
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