Roberto Succo revient sur le célèbre fait divers des années 80. Patrick Dell’Isola y incarne le major Thomas, un gendarme dont l’arrestation de Succo devient l’obsession. Dell’Isola, formidable comédien découvert dans Etat des lieux de Jean-François Richet, présente le film de Cédric Kahn.
Comment présenteriez-vous le film de Cédric Kahn ?
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Patrick Dell’Isola Cédric a filmé Succo comme quelqu’un qui n’a aucune moralité, aucune censure dans ses actes et ses pensées. Il vit le présent, il est étranger à toute forme de conscience collective. Mais Cédric ne juge pas ce comportement. Il laisse le spectateur se débrouiller avec ça. C’est ce qui fait qu’on peut sortir de la projection complètement sonné, ne sachant pas quoi penser de ce type.
Vous incarnez le gendarme qui poursuit Succo : qui est le major Thomas ?
Il est la synthèse de différents flics qui ont travaillé sur ce fait divers. Cédric m’a prêté un documentaire sur les nouvelles méthodes de traque des serial-killers où l’on voyait l’adjudant Abgrall enquêter sur l’affaire Holmes : un type très professionnel, sans états d’âme en apparence. Et puis, à la lecture du scénario, j’ai compris que le major Thomas était un peu comme ces flics qu’on trouve dans les romans de James Ellroy : c’est comme s’il revêtait une armure très professionnelle pour ne pas se faire aspirer par la morbidité de Succo. Mais à l’intérieur, on sent qu’il bouillonne.
Est-ce que le point de vue du major Thomas n’est pas le point de vue de Cédric Kahn sur Succo ?
Sans doute, et il sert aussi de point de vue au spectateur. On peut s’identifier à lui. Au départ, le scénario était beaucoup plus clair : on comprenait très bien la fascination du major Thomas pour Succo. Il décrochait de plus en plus de sa vie, quittait sa femme, etc. Mais Cédric a beaucoup gommé cette lisibilité au montage : désormais, c’est plus obscur, plus souterrain. Pareil sur Succo d’ailleurs : pour lui aussi, les notations psychologiques ont été évacuées au maximum. C’est la subtilité du travail de Cédric Kahn.
Comme vous disiez plus haut, à la fin du film, on ne sait pas quoi penser de Succo…
La fin du film est très forte. Au départ, il y a un rythme presque anodin avec une histoire d’amour, puis on part dans un tourbillon où l’on finit par ne plus rien comprendre. Il y a comme une ombre mystique qui plane sur toute cette histoire, une fatalité inexplicable. Ça dépasse l’entendement humain, un peu comme la théorie du chaos : on arrive à la déterminer mais pas à la prévoir.
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