Invité d’honneur au festival de Deauville, Orlando Bloom s’est confié à nous. Au programme : Pirates des Caraïbes, Johnny Depp et l’UNICEF.
Invité pour un hommage au festival de Deauville, sans actualité brûlante, Orlando Bloom en a profité pour montrer une image différente de celle du poster boy pour adolescentes qui lui colle à la peau, depuis que des oreilles d’elfe et un bouc de pirate l’ont propulsé dans le star system au début des années 2000. A 38 ans, le comédien britannique rêve d’une seconde carrière (qui tarde à se concrétiser) et offre en attendant sa notoriété à diverses causes humanitaires ou environnementales.
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On vient d’annoncer que vous alliez reprendre un des rôles qui vous a rendu célèbre, celui de Will Turner dans le cinquième Pirates des Caraïbes. Franchement, ça vous excite encore ?
Franchement, oui ! Les Pirates des Caraïbes sont une franchise que j’affectionne. Ca m’a ouvert un tas de porte, je ne serais pas qui je suis aujourd’hui sans ce rôle. Et puis c’est le genre de films que mon fils va regarder dès qu’il en aura l’âge… Mais bon, de toute façon c’est un petit rôle, au tout début et à la fin du film. Jerry (Bruckheimer, le producteur, ndlr) m’a appelé en me disant qu’il avait absolument besoin de moi, je me voyais mal refuser.
Vous faites le grand écart en jouant dans Digging for fire, le prochain Joe Swanberg, un des piliers du mumblecore (cinéma fauché et bavard, plus ou moins improvisé, ndlr). Comment vous êtes vous retrouvé sur ce projet ? Est-ce que vous cherchez à casser votre image ?
Je voulais simplement m’amuser en essayant un truc nouveau. Swanberg a une méthode de travail que je n’avais encore jamais expérimentée et qui m’a séduite. C’est lui qui m’a appelé. On s’est vus un soir, il m’a présenté la situation de départ de son film (Rosemary DeWitt rencontre un type à une soirée…) et m’a demandé ce que je ferais à sa place. On s’est bien entendus et à partir de ça il a un premier jet de scénario, mais on a essentiellement improvisé sur le plateau. C’est beaucoup plus complexe qu’il n’y parait, l’improvisation. La plupart des gens pensent que c’est plus simple que d’écrire des dialogues mais ils se trompent : les premières idées qui viennent sont souvent mauvaises, et il faut savoir ensuite creuser dans la bonne direction. Swanberg est passé maître dans cet art.
Dans Zulu de Jérôme Salle, vous avez aussi montré une nouvelle facette de votre jeu, plus sombre, plus politique aussi, puisque le film montre les magouilles de certains blancs pour garder le pouvoir malgré la fin de l’Apartheid en Afrique du Sud…
Oui, c’est un film qui me tient d’autant plus à coeur que mon père adoptif était sud-africain, et impliqué dans la lutte contre l’Apartheid. De tous les films que j’ai fait, c’est un de ceux dont je suis le plus fier. J’ai envie de continuer à faire des films comme ça. Des films… le meilleur terme serait honnêtes. Le seigneur des anneaux, c’était chouette, Peter Jackson est un génie et ça m’a apporté des nuées de fans qui me courent après en hurlant Legolas (rires), mais c’est un héros un peu unidimensionnel vous voyez. Or quand on est acteur, on veut explorer les aspects plus sombres de la nature humaine, on veut mettre sur l’écran des choses qu’on a ressenties quand on a 38 ans et qu’on a un peu vécu…
Vous avez joué dans un épisode d’Extras, la série de Ricky Gervais, dans lequel vous vous parodiez vous-même en tant que fan boy de Johnny Depp. Sa dernière pub pour Dior, où notamment il creuse dans le désert, vous l’avez vu ? C’est un peu embarrassant non ?
Si vous comptez sur moi pour dire du mal de Johnny, vous avez frappé à la mauvaise porte (rires). Johnny c’est Johnny, mec…
Vous êtes impliqué dans une association de protection de l’environnement, or s’ouvre à Paris dans quelques mois la COP21, énième sommet international sur le réchauffement climatique dont les experts s’accordent à dire qu’il accouchera au mieux de mesurettes non contraignantes. Vous restez optimistes sur notre capacité à freiner le réchauffement ?
(il prend une grande inspiration) Tant que les intérêts privés, le big business, gouverneront, je crains que la situation reste bloquée. Les chefs d’Etat semblent ne pas prendre en compte l’intérêt général, et même lorsqu’ils sont sincèrement conscients des problèmes, ils ne parviennent pas à changer la situation… Quand le manque d’eau se fera trop sentir (c’est déjà le cas en Californie, où j’habite) ou quand il n’y a aura plus de poissons à pécher, des changements auront lieu. En espérant qu’il ne sera pas trop tard…
Et en attendant ?
Je n’ai pas de solution miracle, sinon ça se saurait, mais j’ai le sentiment que c’est à chaque citoyen de prendre ses responsabilités, en agissant à son niveau, et sans doute à nous, les artistes, de montrer l’exemple. Personnellement, je fais des économies d’énergie, j’ai fait poser des panneaux solaires sur ma maison, je trie les déchets, j’interviens auprès d’enfants pour les sensibiliser, leur expliquer qu’il ne faut pas baisser les bras… Je fais ce que je peux, à mon niveau.
En tant que citoyen britannique, même si vous vivez aux Etats-Unis, est-ce que l’afflux massif de réfugiés ces derniers mois est un sujet qui vous touche ? Pensez-vous que l’Europe devrait en accueillir plus ?
Je ne suis pas ce qui se passe au jour le jour, mais j’ai vu la photo du petit syrien noyé comme tout le monde et j’ai été révolté… Encore le mot est faible… En tant qu’ambassadeur UNICEF, je me suis rendu l’an dernier à la frontière jordano-syrienne, et j’y ai vu le deuxième plus grand camps de réfugiés du monde. Beaucoup des gens qui s’y entassent avaient des vies tout à fait normales, comme vous et moi, et d’un coup ils se retrouvent là, sans rien, et sans aucun espoir de retour à court terme. Il ne suffit pas de leur distribuer de la nourriture et des vêtements, il faut leur offrir un avenir, et l’Europe devrait jouer un plus grand rôle qu’elle ne le fait aujourd’hui…
Comment ? En ouvrant les frontières ?
Je ne suis pas un politicien, seulement un acteur, mais je pense que la décence la plus commune nous oblige à en accueillir autant que possible, oui. Avant d’être des réfugiés, ce sont des êtres humains.
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