LE FILM : Reds est plus intéressant que sa réputation de fresque intimiste couronnée par les oscars, voire que son ambitieux projet de biographie hollywoodienne de John Reed, figure légendaire de la gauche américaine. Reed, journaliste et activiste communiste, témoin de la Révolution russe, fut l’auteur du célèbre 10 jours qui ébranlèrent le monde préfacé par […]
LE FILM : Reds est plus intéressant que sa réputation de fresque intimiste couronnée par les oscars, voire que son ambitieux projet de biographie hollywoodienne de John Reed, figure légendaire de la gauche américaine. Reed, journaliste et activiste communiste, témoin de la Révolution russe, fut l’auteur du célèbre 10 jours qui ébranlèrent le monde préfacé par Lénine. Le sujet, anachronique dans l’Amérique des années 80 et son regain d’anticommunisme, aurait pu laisser craindre une superproduction académique, une version plus intellectuelle du Docteur Jivago de David Lean. Heureusement, le résultat mégalomane de Reds est à l’image de son auteur complet, Warren Beatty : intelligent, complexe, séduisant. Acteur sous-estimé dont on a oublié la place essentielle dans le cinéma américain des années 70, la star au physique de playboy fut un auteur avant de passer directement à la mise en scène, en produisant la plupart des films où il avait la vedette. Reds lui fournit l’occasion de devenir un véritable cinéaste en abordant un sujet frontalement politique. La réussite tient dans l’équilibre émouvant installé entre l’histoire d’amour de Reed avec l’écrivaine féministe Louise Bryant et la relation étroite entretenue par le couple avec l’histoire du XXe siècle. Beatty montre avec subtilité le rapport au travail et au monde que peut entretenir un couple, parallèlement à ses tourments intimes. C’est cette dimension intimiste qui surprend le plus dans un film historique à grand spectacle qui, malgré la tentation de son sujet, ne sacrifie jamais aux mouvements de foule mais se concentre sur les dialogues, les affrontements verbaux, les débats d’idées ou les scènes de ménage. Il y a dans Reds l’idée géniale de ne montrer sur la Révolution, et ce en trois heures et quatre minutes, que deux très courtes scènes d’action, où l’on voit Reed absurdement courir après un chariot, d’abord au Mexique puis en Russie, sans que le sens concret ou allégorique de cette course ne soit explicité. Géniale aussi l’insertion d’entretiens filmés en gros plan de témoins de la vie de Reed, qui apportent des commentaires très impressionnistes, parfois anecdotiques, en marge de la fiction. Cette proximité inédite entre des images et sons documentaires et la reconstitution hollywoodienne la plus luxueuse n’est pas la moindre invention d’un film audacieux et réfractaire au monumentalisme.
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LES DVD : Un making-of où Beatty explique comment il a réussi à convaincre deux studios hollywoodiens de produire un film à gros budget de trois heures sur un communiste qui meurt à la fin.
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