Un troisième volet, à la fois raciste et sexiste, tout aussi indigeste que les précédents.
Christian Clavier longe les murs de Chinon, sa ville tant aimée où se sont désormais installés tous ses gendres envahissants : son café, sa place, ses ruelles, il n’y a plus aucun endroit de répit pour le père Verneuil qui finira par se carapater auprès de sa femme. Il maugrée en tapant du pied : “Ils sont partout !”. Ce gimmick raciste lance le film dans la continuité des deux premiers, ces comédies éculées, travaillées par une seule et délirante motivation qui consiste à remâcher inlassablement leurs propres punchlines souffreteuses (à ce titre, la première demi-heure du troisième volet est un sommet d’épuisement).
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Mais une chose est sûre, le blockbuster franchouillard est bien de retour et il affiche ses ambitions : plus de personnages donc plus de bouffonneries. L’évolution des affiches des trois opus en témoigne, elles sont de plus en plus remplies, la photo de famille sature et se densifie. Cette fois, les quatre gendres invitent leurs parents depuis leurs pays d’origine dans la grande maison familiale, à l’occasion des 40 ans de mariage du couple Verneuil. Plutôt qu’un nouvel élan scénaristique, c’est une opération mathématique décomplexée qui se met en place : Qu’est-ce qu’on a tous fait au bon Dieu ? devient ainsi une comédie ringarde au carré, qui n’a plus peur de rien parce que tout est bon à prendre.
Cette prolifération de figures sans queue ni tête donne lieu une série de saynètes de frictions aberrantes. Dans un geste boulimique (ce n’est pas pour rien que cette trilogie est aussi obsédée par la bouffe), le film engloutit absolument tout ce qui peut être pris pour cible de mépris facile : l’art contemporain, le théâtre, nos ennemis héréditaires les Allemands, les handicapé·es… Tout y passe. On fait répéter dix fois à une grand-mère asiatique sa commande (“un ballon de Côtes et de la cochonnaille !”), un collectionneur d’art germanique perfide fait la cour de manière agressive, un ouvrier portugais déguisé en Super Mario construit un mur en briques pour séparer un jardin arabe d’un jardin juif et un Jésus noir les observe en croquant dans le fruit défendu… Le burn out n’est jamais très loin.
Guerre des genres
Toutefois, au-delà de tout ce dédain et du versant xénophobe que la saga triture depuis maintenant trois films, ce sont aussi des formes de plus en plus sexistes qui s’imposent. Si les personnages vieillissent mais n’évoluent jamais – missionnés pour dissimuler le plus habilement possible leurs petites idées arrêtées – ils n’ont jamais été autant condamnés à rester dans leur camp, c’est-à-dire dans leur genre. Les hommes et les femmes sont constamment séparé·es, dans le scénario, dans les plans, dans la mise en scène, dans les idées, tout est là pour vous rappeler que rien ne vaut un bon moment de “nouba”, loin des lourdauds de maris ou des compagnes castratrices. Toutes les paix sont alors consommées dans la plus grande hypocrisie, autour d’un dernier traditionnel buffet, le moment parfait pour compter les points et désigner le champion. Même un tube de Johnny Hallyday chanté à l’assemblée en guise de rédemption ne pourra rien sauver. Victoire de la cochonnaille sur la tarte aux salsifis.
Qu’est-ce qu’on a tous fait au Bon Dieu ? de Philippe de Chauveron – en salle le 6 avril 2022
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