Quels sont les films à aller voir, ou pas, ce week-end ? Pour en avoir un indice, voici l’avis de nos critiques.
High Life de Claire Denis
Avec Robert Pattinson, Juliette Binoche, André Benjamin, Mia Goth
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Le film ne met en scène le futur que pour parler de notre présent où, déjà, la haute technologie cohabite avec la grande misère, économique, politique, affective. Les passagers du vaisseau numéro 7, tous des assassins condamnés à mort, ont accepté, en échange de leur liberté conditionnée, d’être les esclaves volontaires d’une expérience qui oscille entre la quête d’une source d’énergie inédite et la recherche contrainte de nouvelles formes de reproduction. High Life est un stalker, feu follet qui nous guide dans une forêt sombre où la ligne droite n’est jamais le plus court chemin pour atteindre l’utopie. La beauté et l’émerveillement de l’utopie, l’amour, malgré tout.
Retrouvez l’intégralité de la critique de Gérard Lefort.
Heureux comme Lazzaro d’Alice Rohrwacher
Avec Adriano Tardiolo, Alba Rohrwacher, Agnese Graziani, Sergi Lopez
Lazarro est l’homme à tout faire de l’inviolata : celui qui récolte le plus de tabac, celui qui guette le loup la nuit jusqu’à l’épuisement, celui qui jamais ne dit non et accepte les tâches les plus ingrates. Lorsqu’il revient à la vie après un accident tragique, il tente de retrouver les membres de sa communauté, mais le monde a profondément changé. En poussant la bonté de Lazzaro jusqu’à des sommets de naïveté, le film adopte un ton plus cynique, et frôle la cruauté lors de sa dernière séquence. Il reste heureusement ouvert à des courants d’émotion pure qui s’engouffrent à travers quelques scènes bouleversantes. Ce souffle lui permet in fine de choisir la mélodie de l’émancipation contre la mécanique des humiliations, et de transformer l’acharnement de la meute d’humains en une course de vieux loup solitaire.
Retrouvez l’intégralité de la critique d’Alexandre Büyükodabas.
Crazy Rich Asians de Jon M. Chu
Avec Constance Wu, Henry Golding, Michelle Yeoh
Loué majoritairement pour être la première comédie romantique américaine “de studio” avec un cast intégralement asiatique, le film a parallèlement été tancé par certains, pour n’être pas représentatif de la réalité du pays où il se déroule : la charmante République de Singapour, à la fois hyper autoritaire et ultra-libérale, et que Jon M. Chu voudrait faire passer pour une idyllique contrée de princes charmants et de princesses en fleurs. Si Crazy Rich Asians, ne s’intéresse pas aux prolétaires, son principal problème n’est pas celui-ci – on a fait de très grands films sur les seuls aristocrates –, mais plutôt de ne représenter strictement personne, ni les riches ni les pauvres, tant ses personnages sont creux, son écriture paresseuse, sa mise en scène absente, ses sentiments mièvres.
Retrouvez l’intégralité de la critique de Jacky Goldberg.
Un amour impossible de Catherine Corsini
Avec Virginie Efira, Niels Schneider, Camille Berthomier
Adapter le roman éponyme de Christine Angot, qui raconte l’histoire de la vie de sa mère, de sa propre enfance et de sa jeunesse, était sans doute une gageure. Pourquoi ? A cause du père, bien sûr, personnage indéfendable qui, de bout en bout, accumule les tares : bourgeois méprisant, amant quand il en a envie, et père incestueux. Toute la réussite du film tient à une idée aussi simple qu’intelligente : jamais le personnage de Philippe n’est chargé par la mise en scène. Ses actes et ses paroles suffisent à le condamner. Depuis son film précédent, La Belle Saison, Catherine Corsini semble avoir retrouvé un nouveau souffle, une nouvelle inspiration, en parfait accord avec l’exaspération actuelle de toutes les femmes face à la violence des hommes.
Retrouvez l’intégralité de la critique de Jean-Baptiste Morain.
Samouni Road de Stefano Savona
S’il revient sur le contexte de son précédent film Plomb durci, c’est-à-dire la guerre de Gaza de 2008-2009, qui fit 13 morts côté israélien et plus de 1 300 côté palestinien, Stefano Savona remplace la linéarité et le point de vue du journal de bord par une hybridation reposant sur trois régimes d’images différents, quatre temporalités et la restitution de la parole des membres survivants du clan Samouni, en particulier une petite fille, véritable guide à travers tout le film. Malgré un déséquilibre, notamment dans l’utilisation de l’animation, Samouni Road reste un passionnant documentaire, qui, à l’instar de l’excellent Homeland : Irak année zéro d’Abbas Fahdel (2015), donne de la guerre une vision à hauteur d’enfants d’une rare pertinence.
Retrouvez l’intégralité de la critique de Bruno Deruisseau.
Un homme pressé de Hervé Mimran
Avec Fabrice Luchini, Leïla Bekhti
Et si Un homme pressé était une parfaite déclinaison cinématographique de la rhétorique macronienne ? Choix évident alors que celui de Luchini, acteur de droite multigénérationnel mais apprécié par la gauche, pour incarner le protagoniste principal. Tout ce système trouve son étincelante acmé vers la fin du film lorsqu’après avoir perdu son emploi, le personnage principal s’adonne à une longue randonnée. Comme un symbole, l’homme pressé est devenu l’homme en marche. Et, de fait, on ne spoilera pas, mais il n’aura même pas besoin de traverser la rue pour retrouver un job.
Retrouvez l’intégralité de la critique de Ludovic Béot.
Sale temps à l’hôtel El Royale de Drew Goddard
Avec Jeff Bridges , Cynthia Erivo, Chris Hemsworth
Sale temps à l’hôtel El Royale est une vraie-fausse série B, un polar pop qui singe la théâtralité charmeuse du bis, à travers la réunion plus ou moins hasardeuse d’une galerie de personnages estampillés “hauts en couleur” (un dandy bruyant, un vieux prêtre sympathique, une belle à fort caractère…). Une mauvaise ironie embaume le projet, carte postale trop cabotine pour être honnête.
Retrouvez l’intégralité de la critique de Théo Ribeton.
Family Film d’Olmo Omerzu
Avec Karel Roden, Eliska krenkova, Jenovéfa Boková
Un jour, les parents d’une famille bourgeoise décident de partir en vacances, laissant leurs deux enfants derrière-eux, seuls à l’appartement. On suit alors le quotidien de la grande sœur, déjà majeure, et de son frère en pleine adolescence. Ce qui plaît dans la première demi-heure de Family Film, c’est cette façon dont le récit résiste à nous dérouler son programme. Un sentiment étrange, glacial, habite chaque plan. Et puis ces interrogations s’effacent lorsqu’un incident majeur survient au milieu du film. Planqué derrière sa distance d’entomologiste, Olmo Omerzu n’a pourtant ni la férocité de Haneke, ni l’ironie de Chabrol et ses ficelles scénaristiques, beaucoup trop factices frôlent littéralement le grotesque dans le dernier quart d’heure.
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