Barbenheimer, l’explosion du “Consentement” grâce à TikTok, la résistance du cinéma d’auteur·ice français, les blockbusters Pathé font mieux que Marvel… Le box-office français de l’année 2023 regorge de surprises et en dit long sur l’état actuel du cinéma.
En cette dernière semaine de l’année, une période particulièrement lucrative pour les salles de cinéma, Wonka et Les Trois Mousquetaires : Milady viennent tous deux de franchir le million d’entrées, portant à 40 le nombre de films devenus millionnaires en 2023. C’est le meilleur résultat de la période post-Covid (ils étaient au nombre de 13 en 2020, 25 en 2021 et 28 l’année dernière), et un score plutôt encourageant, s’approchant presque des 51 films millionnaires de 2019. Mais quels sont les succès et les échecs marquants de l’année écoulée ?
{"type":"Pave-Haut2-Desktop"}
En haut des tops : l’animation
Cette année, le champion toutes catégories est un film sino-américain exfiltré de sa Nitendo originelle : Super Mario Bros. le film (7 359 395 entrées en France). Le personnage de jeux vidéo le plus connu de tous les temps a su attirer un public large en comptant sur plusieurs générations de joueurs·ses, au point de devenir le plus grand succès d’Universal Pictures en France, mais aussi le 17e plus grand succès au box-office de tous les temps, avec 1,361 milliard de dollars de recettes.
Un deuxième film d’animation apparaît dans le top 10 du box-office annuel : Élémentaire (8e place, 3 310 378 entrées), film Pixar à la longévité impressionnante avec près de 25 semaines d’exploitation. Mais, à d’autres échelles, le succès est aussi au rendez-vous : Le Garçon et le Héron de Hayao Miyazaki est devenu le plus grand succès du Japonais en France avec 1 517 325 entrées à ce jour ; tandis que Suzume de Makoto Shinkai a également présenté de bons résultats en dépassant les 540 000 entrées en France. Si elle n’a pas fédéré un public aussi large, l’animation française n’est pas en reste avec des propositions fortes et variées, comme Mars Express (156 536 entrées au 19 décembre) ou Linda veut du poulet (110 610 entrées).
Une année riche en blockbusters ?
Parmi les blockbusters annuels capables d’attirer un très très grand public, on retrouve cette année trois suites de sagas américaines dans le top 10 : Les Gardiens de la galaxie Vol. 3 en 6e position avec 3 604 845 entrées ; Indiana Jones et le Cadran de la destinée à la 9e place avec 3 049 043 entrées et Mission impossible 7, 10e, avec 2 617 032 entrées. Deux sont français : Astérix et Obélix : L’Empire du Milieu en 3e position avec 4 622 711 de spectateurs·rices et Alibi.com 2 à la 5e place (4 277 971 entrées).
Plusieurs leçons sont à en tirer : la formule super-héroïque Marvel semble arriver à bout de souffle, et seuls ses héro·ïnes les plus aimé·es sont capables de grands scores (Spider-Man, la réunion des Avengers, les Gardiens…), a contrario d’une majorité d’entre eux qui, cette année, réalisent des scores qui vont de mal en pis : The Flash, The Marvels et Blue Beetle n’ont par exemple pas dépassé les 900 000 entrées. Les stars américaines d’hier continuent d’attirer du monde en salle sur leur seul nom (Harrison Ford, Tom Cruise), tandis qu’en France, c’est la Bande à Fifi (Alibi.com 2 ou 3 Jours max…) qui semble seule capable de cet exploit, sur un versant comique.
Le cas Astérix est plus complexe. Plus grand succès de l’année, le film demeure un triomphe en demi-teinte au regard de son budget (66 millions d’euros) et de ses prévisions, que la maison mère Pathé espérait aux alentours des 6 millions d’entrées. De plus, le film est devancé par Les Trois Mousquetaires si l’on additionne le box-office des deux parties, qui pourrait, lui, dépasser les 6 millions d’entrées au terme de l’exploitation de Milady, pour un budget avoisinant les 72 millions d’euros.
Des films devenus viraux grâce à Internet
Si quelques inquiétudes éternelles continuent de planer sur le cinéma (sa mort supposée, la désertion du cinéma d’auteur·ice par le jeune public…), quelques phénomènes devenus viraux ont surpris l’ensemble de l’industrie, et profité au cinéma avant tout. En premier lieu, Barbenheimer. Découvrant la sortie, le même jour, de deux films aux antipodes l’un de l’autre (Barbie de Greta Gerwig et Oppenheimer de Christopher Nolan), la communauté Internet s’est amusée à mélanger les deux films pour donner “Barbenheimer” et à imaginer toutes sortes de blagues, mèmes ou tenues vestimentaires pour aller voir les deux films, parfois à la suite. À l’arrivée : une tendance qui a tenu tout l’été et boosté sans aucun doute les entrées des deux films, même si Barbie est (sans grande surprise) sortie gagnante de ce match du siècle.
Deux autres films, d’auteur·ice et français cette fois, ont également pu profiter d’une immense médiatisation imprévue au départ. Justine Triet tout d’abord, avec son immanquable Anatomie d’une chute, qui en l’espace d’une soirée, a fait exploser les espérances de son film en remportant la Palme d’or à Cannes et en donnant un discours fort et engagé, qui fit réagir toute la classe politique (pour le pire). Au final, le cinéma triomphe encore : plus d’1,3 million de spectateur·ices français·es, autant à l’étranger, des prix pleins les bras remportés partout dans le monde… bref, un succès critique et public pour un film exigeant, de près de 2 h 30.
Enfin, c’est Le Consentement de Vanessa Filho qui a connu une exploitation mouvementée dans les salles françaises. Adapté du livre de Vanessa Springora et narrant sa relation problématique avec l’écrivain Gabriel Matzneff, le film était parti pour viser les 200 000 entrées environ. Mais la récupération du film par la jeune génération sur TikTok lui valut un tout autre destin : en se filmant avant et après la séance pour témoigner du choc ressenti par cette histoire, le film toucha près de 16 millions de personnes sur le réseau social, et attira en fin de compte plus d’un demi-million de spectateurs·rices.
Un cinéma d’auteur·ice bouillonnant
Enfin, en dehors des films millionnaires, il est primordial de rappeler l’extrême vivacité du cinéma d’auteur·ice en France. Le cas le plus visible est sans doute celui de l’acteur Raphaël Quenard, qui, en l’espace de deux premiers rôles en 2023, est devenu incontournable et sacrément populaire auprès du public : Yannick (sorti début août en toute précipitation, a vendu plus de 445 000 tickets) et Chien de la casse (qui lui vaut une nomination aux César, et qui ramena 82 971 spectateurs·rices dans les salles grâce à un sacré bouche à oreille).
Autres succès du cinéma d’auteur·ice français en 2023 : Le Règne animal a franchi le million d’entrées, le film de Thomas Cailley rappelant avec Justine Triet qu’un cinéma exigeant et avisé est encore capable de séduire le grand public. À mi-chemin entre art et essai et cinéma populaire, d’autres films français ont attiré plusieurs centaines de milliers de personnes, voire le million : Tirailleurs (1 196 248 entrées), Mon crime (1 091 489 entrées), Bernadette (802 359 entrées), Jeanne du Barry (764 480 entrées, un semi-succès en le rapportant à son budget de 22,4 millions d’euros) et La Syndicaliste qui franchit de justesse les 500 000 entrées. À l’international, des films d’auteur·ice très exigeants et encensés par la critique comme L’Arbre aux papillons d’or ont également réussi à trouver leur public, avec, en l’espèce, 52 161 entrées.
{"type":"Banniere-Basse"}