L’Alliance Française de Singapour, une organisation éducative à but non lucratif liée au Ministère des Affaires étrangères, a publié ce week-end une vidéo de campagne un peu étrange dont le but était de promouvoir la culture française à travers le rayonnement de son cinéma d’auteur. Le dispositif mis en place est le suivant: un réalisateur français anonyme rend visite à […]
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L’Alliance Française de Singapour, une organisation éducative à but non lucratif liée au Ministère des Affaires étrangères, a publié ce week-end une vidéo de campagne un peu étrange dont le but était de promouvoir la culture française à travers le rayonnement de son cinéma d’auteur. Le dispositif mis en place est le suivant: un réalisateur français anonyme rend visite à trois producteurs américains et tente de leur vendre trois pitchs de films. La particularité étant que ces projets ont déjà été réalisés, ont été acclamés par une grande majorité de la critique internationale et sont même chacun lauréat d’une Palme d’or. Ces films ce sont Amour de Michael Haneke, Entre les murs de Laurent Cantet, et La Vie d’Adèle d’Abdellatif Kechiche. Durant trois minutes, devant le discours passionné du réalisateur, les producteurs refusent, chacun leur tour, désolés, de ne pouvoir participer aux projets car, selon eux, ils manquent d’enjeux dramatiques, de tensions et donc ne sont pas bankables.
Sous sa démarche bienveillante envers le cinéma d’auteur français, cette vidéo soulève pourtant quelques questions. D’abord, la véracité du dispositif: les producteurs (qui n’ont jamais entendu parler de ces films ??) acceptent étrangement d’être filmés alors que ce genre de réunion est censé être habituellement strictement privée.
Ensuite, et c’est le point le plus problématique, cette vidéo de campagne met en avant une vision binaire voire clairement réductrice du paysage cinématographique mondial avec d’un côté, un cinéma d’auteur français cannois ultra exigeant et, de l’autre, les productions bankables d’Hollywood. Or on n’apprend pas grand-chose en voyant Jack Hogan, producteur des clips, par ailleurs excellent de la chanteuse Sia, William Fay, producteur délégué de 300 de Zack Snyder, Independance Day de Roland Emmerich et Very Bad Trip de Todd Phillips, et Andrew Light, producteur de Waterworld de Kevin Reynolds et Disjoncté de Ben Stiller, refuser de produire La Vie d’Adèle, Entre les murs et Amour. Margaret Ménégoz, productrice des films de Michael Haneke depuis 2003, aurait-elle de son côté accepté de produire le péplum 300 ?
Evidemment, il existe deux types de cinéma qui sont opposés mais ne sont-ils pas pour autant complémentaires ? C’est tout de même un peu dommage que pour promouvoir le cinéma d’auteur, cette vidéo ait besoin, dans un geste défensif, de stigmatiser le cinéma de divertissement hollywoodien.
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