Dans la nouvelle pub radio du plus célèbre des fabricants de meubles suédois, une jeune femme reproche à son copain de lui avoir dévoilé avec enthousiasme les nouveautés du dernier catalogue. Le spoiling, ou plutôt l’antispoiling, est d’actualité.
Dans la nouvelle pub radio du plus célèbre des fabricants de meubles suédois, une jeune femme reproche à son copain de lui avoir dévoilé avec enthousiasme les nouveautés du dernier catalogue. Le spoiling, ou plutôt l’antispoiling, est d’actualité.
{"type":"Pave-Haut2-Desktop"}
Ce qui est patent, c’est que le spoiling bashing a graduellement atteint, avec le succès gigantesque des séries télé, un niveau de violence (verbale, a priori) inédit. Qui n’a jamais lu sur les réseaux sociaux des internautes menacer des pires fléaux celui ou celle qui leur révélera un seul élément, une seule image du nouvel épisode de Game of Thrones ? Les téléspectateurs exigent le secret, l’exclusivité. Ils ne veulent même pas qu’on leur dise si “c’est bien” ou pas.
La crainte du spoiling atteint le 7e art
En l’occurrence, la série étant la version contemporaine du feuilleton, et reposant donc énormément sur le scénario, les rebondissements, les retournements de situation, etc., on peut très bien comprendre que ses spectateurs refusent d’en savoir trop. Mais le cinéma, que l’on croyait au-dessus de ça, où il semblait que la mise en scène était plus importante que l’histoire ? – la preuve en est que l’on peut revoir 352 fois Psychose ou Vertigo avec le même plaisir inentamé.
Depuis peu, le 7e art s’est pris la crainte du spoiling en boomerang, comme si l’attitude du spectateur de séries déteignait sur son accueil du cinéma. Certains lecteurs de journaux s’interdisent de lire les critiques des films qu’ils ont envie de voir par crainte de révélations trop précises. A la radio, à la télévision, les animateurs ne cessent de réfréner l’ardeur de leurs chroniqueurs : “N’en dites pas plus, nous allons encore recevoir des mails rageurs…”
Pourquoi cette passion pour les bandes-annonces ?
Paradoxalement, grâce aussi à internet, jamais le public n’a été aussi avide de bandes-annonces alors que souvent, le conflit principal et des éléments essentiels du récit s’y trouvent révélés. Alors ?
Ce que reproche la lectrice du catalogue de meubles, c’est moins le dévoilement de l’information que l’appréciation qu’en fait son conjoint. Elle désire se faire sa propre opinion, avant d’en discuter avec lui. Le spectateur contemporain veut bien du discours, du commentaire, de la critique, mais après avoir vu le film. Comme s’il exigeait son émancipation.
{"type":"Banniere-Basse"}