Le paquebot refait surface pour ses 25 ans, boosté par les technologies testées sur “Avatar”. Un étrange refus d’abandonner le film au passé.
Dix ans après une première ressortie rehaussée en 3D, Titanic revient dans une nouvelle version remastérisée en 4K, HDR et surtout HFR, c’est-à-dire à l’unisson technique de la saga Avatar dont le premier volet avait lui aussi connu une mise à jour similaire en septembre dernier. Avant, probablement, une enfilade de versions qui intégreront les révolutions accolées à chaque nouvel épisode de la franchise – jusqu’à un Avatar 8 que signera en 2050 une intelligence artificielle encodée à partir du cerveau de feu Cameron et se chargera de convertir le film de 1998 dans un format VR sans casque permettant de le regarder par la pensée.
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Blague à part, il n’est pas anodin que le cinéaste s’obstine à doper Titanic vers les sommets du figurable sans cesse repoussés par Avatar. Car il n’a au fond jamais retrouvé avec son film-monde l’ivresse d’ingénierie de son film-objet : Titanic est son blockbuster idéalement artisanal, parfaitement consubstantiel à la machine qui l’avait produit, machine incarnée symboliquement en lui par le gigantesque corps mécanique du bateau et soumise à une expérience presque transcendantale de représentation et de destruction, au diapason des aspirations prométhéennes de son auteur.
Table de travail
Il y a beaucoup de mélancolie dans cette ressortie, car le HFR, dont on sait à quel point il peut produire un contre-effet de déréalisation, est une technologie paradoxale pour refuser d’abandonner Titanic au passé. Ce que le film y gagne en lisibilité ne fait jamais qu’y figer la mort au travail, mais une mort full HD, plus précise que jamais. Retrouver éternellement ce film, la jeunesse divine de ses interprètes et la pureté de ses sentiments : voilà la quête sisyphéenne de Cameron, pour qui l’entreprise pharaonique d’Avatar n’est peut-être bien qu’une table de travail dont le véritable objet demeure de parfaire sans relâche son authentique chef-d’œuvre.
Titanic de James Cameron, avec Leonardo DiCaprio, Kate Winslet (é.-U., 1997, 3 h 14, reprise). En salle le 8 février.
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