Alors que le géant du streaming s’est offert une orientation cinéphile en mettant à disposition des classiques du cinéma d’auteur avec les films de François Truffaut, Jacques Demy ou encore David Lynch, la plateforme en profite aussi pour mettre à l’honneur le jeune prodige québécois, Xavier Dolan.
« Mes premiers films, ce sont des films d’exploration, je pars dans toutes les directions. Ils sont romantiques et fous », confiait Xavier Dolan dans un entretien accordé aux Inrocks, en octobre 2019, sur la manière dont son cinéma évolue de films en films.
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Si son tout premier, J’ai tué ma mère, ne figure pas parmi les films de l’auteur disponibles sur Netflix, les trois suivants seront disponibles sur la plateforme à partir du 8 mai. Avant que Mommy, encensé à Cannes en 2014 par le Prix du Jury, ou encore Juste la fin du monde, Grand Prix de Cannes en 2016 et triplement récompensé aux Césars l’année d’après, ne lui fassent franchir un cap de popularité énorme (les deux films ont rassemblé chacun plus d’un million de spectateurs en salle en France, contre en moyenne 108 000 pour les quatre précédents), ces trois films posent la patte stylistique de ce petit génie canadien, entre références savantes, thématique LGBT, jeu avec le cinéma de genre, découverte d’identité et surtout tragédie de l’amour impossible. Si le questionnement identitaire et l’impossible amour resteront au centre de son cinéma, les trois films suivants se déploieront dans une veine plus mélodramatique, délaissant un peu la face la plus référencée de son œuvre.
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Le cinéma en tant qu’imaginaire
Réalisé en 2010 alors qu’il n’est âgé que de 21 ans, Les Amours Imaginaires suit Francis et Marie, deux amis de longue date qui s’éprennent en même temps du beau blond bouclé, séducteur aguerri et pervers narcissique, Nicolas (interprété par le sublime Niels Schneider). La comédie est légère, sophistiquée et raconte la vérité du sentiment amoureux avec une puissance rare. D’une certaine manière, Dolan raconte que toute aventure amoureuse, peu importe sa concrétisation – ou non -, planche toujours entre le réel et l’imaginaire.
Pour illustrer cette « pathologie » amoureuse, que l’on a presque tous et toutes connue, il se fabrique un imaginaire fait de ses inspirations cinématographiques. Si on y aperçoit beaucoup du cinéma de Christophe Honoré – Les Chansons d’amour, avec le trio amoureux porté par Louis Garrel – on ne peut s’empêcher de penser au triangle Jules, Jim et Catherine de Truffaut dans Jules et Jim, à Mysterious Skin avec la scène des marshmallows ou encore à Wong Kar-wai dans ses beaux ralentis sur la robe de Monia Chokri. On retrouve aussi dans ces scènes d’interviews entrecoupées par des Fragments d’un discours amoureux de Roland Barthes et des dessins de Cocteau ou même des références à La Recherche du temps perdu de Proust.
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L’expérimentation du genre
« Avec Tom à la ferme, j’ai essayé de faire quelque chose de plus cohérent, plus en maîtrise, plus rugueux aussi, plus réaliste » déclare-t-il dans ce même entretien. Expérimentation de genre, Xavier Dolan réalise en 2013, Tom à la ferme, un thriller psychologique. Le pitch est le suivant : lorsqu’un jeune publicitaire débarque au fin fond de la campagne pour des funérailles, il découvre que personne ne le connaît et s’embarque dans une relation toxique avec son frère aîné.
Loin de sa zone de confort, Dolan retourne sur les traces de l’histoire du thriller et réinvente une fiction à l’image de Psychose et Vertigo. De la même façon qu’avec Les Amours Imaginaires, le cinéaste québécois pioche quelques plans ou effets de style chez les grands maestros tels que Hitchcock.
Marque de fabrique
Entre le polar cauchemardesque et la comédie chamarrée, Xavier Dolan signe en 2012 l’une de ses plus belles œuvres, Laurence Anyways. Encore une fois, Dolan s’accroche à son thème fétiche l’amour impossible, l’amour comme création utopique. Le jour de son trentième anniversaire, Laurence confie à sa partenaire Fred son désir de devenir une femme.
Le film, qui se construit comme une fresque intimiste, s’ancre dans une esthétique plastique propre à Dolan, que l’on retrouve d’ailleurs toujours dans ses œuvres plus récentes. Mosaïque de couleurs, costumes exquis et des soundtracks à chaque fois impeccable, le film exacerbe tous les sens possibles. Dolan souligne notamment cette fermeté artistique « j’ai un côté control freak. Je fais des films intimes et j’ai envie de tenir les rênes jusqu’au bout », dit-il lors d’une interview donnée aux Inrocks, en septembre 2010. Là encore certaines références sont visibles, comme une scène où les vêtements évoluent en suspension dans l’air, qui rappelle la scène iconique de Zabriskie Point.
Ces trois œuvres de Dolan proposée par Netflix – avec J’ai tué ma mère – se déploient toutes sur une veine qu’il délaissera un peu par la suite, celle du film aux références savantes, pour ensuite viser une forme plus mélodramatique, qui correspond à son goût pour le Titanic de James Cameron. Dans une interview, il avoue notamment cette tentative d’une incursion plus hollywoodienne et dit que dans son premier film en langue anglophone : « Titanic est partout dans Ma vie avec John F. Donovan« .
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