Le film le plus visionnaire de Tati, plastiquement stupéfiant.
On ne chantera jamais assez les louanges de ce chef-d’œuvre qui connut un des accueils critique et public les plus injustes de l’histoire du cinéma. Tati y tue le récit et le dialogue pour privilégier l’architecture, l’espace, la gestuelle et les sons en un geste de plasticien et de musicien.
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Si Playtime ne fonctionne pas sur un récit à proprement parler, il raconte néanmoins une histoire, celle de la collision entre monde ancien et monde moderne, vieille Europe et Amérique nouvelle, romantisme et pragmatisme, singularité du local et universalité du global. C’est à la fois beau, hilarant, émouvant et mélancolique.
La mise en scène de Tati est fondée sur une série d’oppositions entre le rigide et le mou, le chaud et le froid, l’ordre et le chaos, la puissance de l’urbanisme contemporain et la faiblesse poétique des corps humains. Le Paris des monuments historiques n’est plus qu’un reflet dans les surfaces vitrées de la modernité dominante.
Si le cœur du cinéaste penche du côté du monde ancien et de son peuple ouvrier,il n’en demeure pas moins qu’il magnifie aussi les réalisations du capitalisme technocratique, même si une saine anarchie festive détruit tout à la fin en réunissant toutes les couches sociales. Le corps humain se rebelle toujours contre le mécanique qu’on veut plaquer sur du vivant.
La critique tatienne “voyait” juste : Playtime préfigure la civilisation de la technologie, des voyages et des loisirs qui est la nôtre aujourd’hui, quarante ans après le film. C’est toute la différence entre Playtime et Amélie Poulain, entre un film visionnaire et une croûte réac. Loin de se réfugier dans une imagerie passéiste, Tati savait regarder son époque avec génie.
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