Matteo Garrone signe une nouvelle adaptation du conte de Collodi qui s’égare dans une débauche d’effets.
Privé de sortie le 18 mars à cause du confinement, le dixième film de Matteo Garrone a entre-temps été vendu par son distributeur Le Pacte à Amazon Prime Video pour une exploitation directe en VOD. Cette stratégie devrait faire des émules, afin d’éviter l’embouteillage de films devant mécaniquement se produire au moment de la réouverture des salles.
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https://www.youtube.com/watch?v=bqo4j55MLLc
Présenté hors compétition à la Berlinale cette année, le film marque les retrouvailles de Roberto Benigni avec un récit qu’il avait porté à l’écran en 2002. Le cabotin italien y incarnait lui-même Pinocchio, alors qu’il est ici devenu son paternel Geppetto. Si cette précédente adaptation du conte de Carlo Collodi était tout entière dévolue aux gesticulations et aux vociférations de Benigni, la star de celle-ci est son habillage d’effets spéciaux.
La misère sociale et le bestiaire fantastique
Techniquement très (trop) propre, le film est saturé de filtres colorés, de maquillages, de prothèses et d’effets numériques en tout genre. Il y a chez Garrone une fascination pour une forme de laideur, un mélange d’heroic fantasy glauque mâtinée de délabrement gothique, déjà à l’œuvre dans Tales of Tales (2015).
Cette esthétique volontairement repoussante et grotesque est une épaisse couche de maquillage derrière laquelle palpite la seule idée de Garrone : faire de Pinocchio le croisement entre Oliver Twist et Alice au pays des merveilles. La misère sociale et le bestiaire fantastique.
Mais là encore, sa traduction en image n’est que cosmétique. Cette vacuité ambiante finit par renvoyer au squelette du récit originel qui ne raconte rien d’autre que le dressage d’un enfant qui apprend durement à préférer le travail et l’étude aux plaisirs du jeu, de l’artifice et de l’aventure. Pour un film qui se vautre dispendieusement dans la fantaisie, ce n’est pas le moindre des contresens.
Pinocchio de Matteo Garrone, avec Federico Ielapi, Roberto Benigni, Rocco Papaleo (It., Fr., G.-B., 2019, 2 h 05). Sur Amazon Prime Video
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