Quelques mois seulement avaient séparé la sortie de Pigalle de celle de Bye bye sur nos écrans l’an passé. Pour Pigalle, premier long métrage après un court (Zoé la boxeuse), Karim Dridi avait plongé dans le milieu de la mafia du sexe concentrée dans ce quartier de la capitale. Les deux personnages principaux Fifi, […]
Quelques mois seulement avaient séparé la sortie de Pigalle de celle de Bye bye sur nos écrans l’an passé. Pour Pigalle, premier long métrage après un court (Zoé la boxeuse), Karim Dridi avait plongé dans le milieu de la mafia du sexe concentrée dans ce quartier de la capitale. Les deux personnages principaux Fifi, jeune pickpocket amoureux de la Divine, un travelo au grand cœur, et Véra, jeune strip-teaseuse travaillant en peep-show maquée avec le Gitan vont se trouver rapprochés par les meurtres de Divine et du Gitan. Tournant caméra à l’épaule dans les rues et les sex-shops de Paris, mêlant les acteurs aux « gueules » du coin, filmant les visages très près des peaux, Dridi fait passer ce sentiment d’urgence et de déliquescence, de pression de plus en plus active sur les personnages dont les vies se rétrécissent à mesure que l’on découvre les arrière-décors de ces devantures de « plaisir ». Leurs destins ne pèsent rien dans les poignes des mafieux qui chapeautent cette microsociété et articulent chacun comme un rouage « bénéficiaire ». Mais Pigalle ne convainc pas entièrement parce que l’identité des personnages n’est pas assez fouillée et approfondie (définie autour de l’axe unique de leur situation) ; d’autre part, l’insistance des effets esthétisants finit par agacer et nuire au propos. Dans Bye bye, Karim Dridi donne chair à tous ses personnages auxquels on s’attache aussitôt avec subtilité et fluidité. Un garçon meurt dans un incendie accidentel ; son frère aîné, Ismaël, se sentant coupable, quitte Belleville pour Marseille avec son autre frère, Mouloud, 12 ans. Là, ils s’installent chez leurs oncle et tante, le temps d’organiser le retour du petit frère au bled où l’attendent ses parents. Durant ces quelques jours, Dridi va filmer la vie d’une famille, en portant à chacun une attention égale. Avec une profonde humanité, il saisit leurs travers, défaillances et difficultés, de la grand-mère muette qui enferme tout dans son regard à la mère qui fume en cachette et donne des cours d’anglais, du père dont l’autorité est désavouée à la culpabilité d’Ismaël, confronté au racisme et à son devoir de « grand frère » envers Mouloud qui fraye avec les dealers du quartier et refuse de rentrer en Algérie. Une famille donc, à la double culture que revendique Dridi, avec ses fractures propres et universelles, ses deuils et ses liens indéfectibles, avec la volonté de rester unie tout en dépassant la génération des parents. Une famille donc.
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