Son premier film culte à redécouvrir, son récent hit champêtre : le cinéma cérébral et sensible de Pascale Ferran.
LES FILMS : Sur une plage, un homme construit un château de sable. Un petit garçon qu’il ne connaît pas s’approche, puis le frère cadet et la soeur aînée de cet homme. L’un après l’autre, chacun de ces personnages va nous raconter sa vie. Petits arrangements avec les morts, Caméra d’or à Cannes en 1994, est un premier film assez impressionnant, presque bluffant, qui manifeste une grande ambition et une volonté de maîtrise de la part de son auteur – peut-être parfois un peu trop, à la limite du trop-plein symbolique. Petits arrangements…parle – au-delà de son sujet, le deuil – de porosité : entre les êtres humains (ici une fratrie), entre les époques, entre les souvenirs, montrés comme des sortes de plaques, des filtres, des écrans parfois trompeurs qui s’interposent sans cesse entre nous et la réalité, la déformant sans cesse. La démonstration, très scientifique, qui fit que certains pensèrent à l’époque au cinéma de Resnais (il y a aussi des souvenirs de Truffaut dans le film), est d’une grande clarté. On notera aussi que Pascale Ferran fait alors appel à des comédiens venus du théâtre (sa soeur Catherine Ferran, le débutant Charles Berling, Didier Sandre), principe auquel elle restera fidèle pour Lady Chatterley (avec Marina Hands et Jean-Louis Coulloc’h), son adaptation, à la hauteur de son modèle, de la deuxième version de L’Amant de Lady Chatterley de DH Lawrence, un film totalement à contre-courant de son époque, une œuvre romanesque et politique sur l’utopie amoureuse, sur la libération des corps (masculin et féminin à égalité), dont on sait aujourd’hui à quel avenir il était promis – César, prix Jean-Vigo, prix des auditeurs du Masque et la Plume… et succès montant auprès du public. Deux films qui possèdent les qualités humaines de Pascale Ferran : sensibilité sans sentimentalité, intelligence chaleureuse et rieuse, attention aux êtres, et aussi grande exigence.
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LES DVD : Les deux films sont accompagnés d’une préface et d’une analyse de scène finement ciselées par Jacques Mandelbaum, critique au Monde. Sur Petits arrangements…, des entretiens avec les trois interprètes principaux, où il apparaît bel et bien que parmi les soucis de Pascale Ferran il y a l’idée que la fabrication d’un film, comme l’amour, doit modifier la vie de ceux qui le font. Mêmes éléments sur Lady Chatterley, où l’on trouve également un making-of absolument passionnant puisque, chose rare, on y voit pour de vrai, dans la durée, des gens assez étonnants (je n’ose pas dire exceptionnels) en train de fabriquer, dans la passion, l’épuisement, l’énervement parfois, avec des moyens réduits, des plans de cinéma qui donneront finalement naissance, une fois agencés et de façon assez mystérieuse, à un grand film. Fascinant.
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