PARIS VU PAR.
..
de Claude Chabrol, Jean Douchet, Jean-Luc
Godard, Jean-Daniel Pollet, Eric Rohmer et
Jean Rouch (France, 1965, 1h30)
(Les Films du Losange/Opening, environ 22 €)
{"type":"Pave-Haut2-Desktop"}
Le manifeste final de la Nouvelle Vague
était un film à sketches. Paris réussi.
LES FILMS Quand ils font des photos,
les gens veulent toujours enlever
les bouteilles de vin ou éviter les fils
électriques qui traversent le champ
– parce que c’est pas beau… C’est
justement la différence entre l’aseptisé
Paris je t’aime (2006), chroniqué ici-même
la semaine dernière,et « le manifeste et le point
final de la Nouvelle Vague » (comme l’appelle
Jean Douchet) qu’est Paris vu par…(1965), où les
cinéastes font justement tout pour que les bouteilles
et les fils électriques apparaissent dans le champ,
parce que la vérité – et l’art – est là (la Nouvelle Vague,
pour ceux qui l’ignoreraient, c’est un mouvement qui se
voulait en rupture avec le cinéma en vigueur, réaliste).
Du coup, Paris je t’aime est un film intemporel, donc
d’aucune époque, donc de nulle part, et Paris vu par…
un film qui capte ses gens, sa ville, son temps : ses jolies
filles qui couchent, ses fieffés dragueurs, ses affiches,
ses immeubles en construction, ses voitures, son métro,
ses rues et leur trafic, sa mode vestimentaire, ses infos
sportives, ses hommes politiques, etc. ; tout en paraissant
étrangement et presque dangereusement actuel.
Paris vu par…, tourné en 16 mm (nouveauté qui faisait
partie du manifeste), a été produit par le jeune Barbet
Schroeder qui visait, en cette année de grâce 1965
où la Nouvelle Vague se mourait commercialement,
à en chanter l’esprit. Pari réussi, Paris vu par…,
au-delà des différences radicales entre les six films
et leurs six cinéastes respectifs, est un film important,
parce que Douchet s’y prend pour Godard
(Saint-Germain-des-Prés), Rouch pour Hitchcock
(un plan presque unique pour Gare du Nord), Pollet
pour Queneau (Rue Saint-Denis), Rohmer pour
super-Rohmer puissance 10 (le très conceptuel
Place de l’Etoile), Chabrol pour son auto-caricature
(il joue le rôle d’un bourgeois immonde dans La Muette)
et Godard, dans Montparnasse-Levallois, tente déjà
de se faire disparaître en faisant tourner le film par
un autre (l’Américain Albert Maysles) – vainement,
tout ici est éminemment godardien.
LE DVD Le film a été « entièrement restauré ». En
bonus, une présentation éclair limpide, brillantissime
et synthétique de l’inénarrable No‘l Simsolo,
de longs entretiens avec Jean Douchet, plus quelques
archives « d’époque », où Rouch s’enthousiasme
à l’avance sur l’arrivée, dans un prochain avenir,
de caméras légères (qui ne pèsent que 20 kg),
de caméras « crayons » qui permettront à tout
un chacun de devenir cinéaste… Jean-Baptiste Morain
{"type":"Banniere-Basse"}